Archive d’étiquettes pour : MCD #80 – Panorama

Bloggeuse, critique et commissaire d’exposition

Régine Debatty est commissaire d’exposition, critique d’art et fondatrice du blog We make money not art. Originaire de Belgique, elle vie entre Londres et Turin. Connue pour ses écrits à la croisée de l’art, du design, des sciences, technologies et problématiques sociales. Elle anime une émission radiophonique hebdomadaire et est co-auteur du livre New Art/Science Affinities et est aussi membre du Royal College of Art.

Régine Debatty. Photo: D.R.

Le succès de votre blog est-il imputable au fait que vous vivez réellement les multiples expériences que vous commentez en anglais en voyageant et en rencontrant ?
Probablement. Outre le contenu du blog, je suppose que les lecteurs apprécient l’honnêteté de mes commentaires et le fait que j’essaie toujours d’apporter un complément à une histoire au lieu de faire un simple copié/collé du communiqué de presse. Au fil du temps, j’ai aussi probablement acquis un ton singulier et mes centres d’intérêt sont clairement définis (même s’ils changent en permanence).

Votre statut de bloggeuse est-il apprécié partout de la même manière ou varie-t-il selon les contextes géographiques et culturels ?
Il varie, c’est certain, mais un peu moins à l’heure actuelle que par le passé. Le contexte géographique est, heureusement, devenu moins déterminant. À l’inverse, le contexte culturel compte toujours dès qu’il s’agit de nommer son activité. J’ai remarqué qu’avant beaucoup de gens me collaient l’étiquette de bloggeuse car cela donnait un côté critique et exotique (dans le monde de l’art). Maintenant, au contraire, ces mêmes personnes ont tendance à éviter de me qualifier de “bloggeuse” de peur de me vexer. Pourtant, je suis toujours aussi ravie d’être une bloggeuse. Il y a cette idée préconçue que l’activité de bloggeur n’est que le point de départ d’autre chose. C’est évidemment et heureusement le cas, mais je peux aussi exercer une activité de critique d’art ou de reporter en parallèle tout en me définissant comme bloggeuse.

En outre, ce qui a changé c’est que les départements marketing (se substituant aux services de presse ou aux commissaires) des grandes institutions culturelles se sont rendu compte que les bloggeurs constituaient une masse qui ne critique pas, ne pense pas et relaie volontiers et gracieusement les informations relatives à leurs événements. Je reçois régulièrement des emails complaisants de départements marketing qui se font « une joie » de me fournir des informations sur leurs expositions à venir, qu’ils m’exhortent à tweeter et à partager sans modération sur Instagram. Ne vous méprenez pas, je suis toujours ravie de promouvoir gratuitement des événements culturels indépendants si les organisateurs me le demandent gentiment et n’ont pas des budgets colossaux à consacrer à la publicité. En revanche, le fait de tweeter constamment au sujet d’une exposition qui n’a pas encore commencé en échange d’une réduction sur le prix de son catalogue ne correspond pas à mon idée d’une communication efficace.

Frederik de Wilde, N0t a Cr1me n°1, 2012. Photo: D.R.

Les technologies numériques sont-elles plus naturellement admises dans la sphère du design ou dans celle de l’art ?
Je ne crois pas. Bien sûr, tout dépend de ce que vous entendez par « art ». Si vous voulez parler de l’art contemporain que l’on trouve, par exemple, à la Frieze Art Fair, alors il est certain que ce milieu ne se préoccupe pas beaucoup de technologie, pas plus qu’il ne se préoccupe vraiment des questions et phénomènes qui façonnent la société contemporaine. Toutefois, s’il s’agit de l’art en général, je dirais que les artistes s’intéressent à la technologie au moins autant que les designers. Certains peuvent utiliser la peinture pour commenter une innovation scientifique, d’autre une rangée de guitares pour explorer les possibilités des technologies du numérique, mais ça ne rend pas leur point de vue moins pertinent ou moins intéressant que celui d’un designer. Bien au contraire.

Les questions d’ordre éthique que soulèvent les pratiques biotechnologiques dans l’art ne sont-elles pas parfois plus intéressantes que les réalisations elles-mêmes ?
Vous avez tout à fait raison, mais il y a aussi des exceptions remarquables. En toute honnêteté, à ce stade, je me moque du déséquilibre entre la pertinence des questions soulevées et la valeur artistique d’une pièce parce qu’en dehors de ces œuvres, je n’ai pas souvent l’occasion de discuter, d’aborder ou d’approfondir les questions liées aux progrès scientifiques. Quoi qu’il en soit, il est encore difficile pour le public ou la critique de juger clairement la valeur artistique de ces œuvres parce qu’elles sont complexes, décalées et souvent tellement anxiogènes qu’on a tendance à se cramponner aux éléments scientifiques et éthiques qui paraissent plus digestes et plus faciles à analyser. Par ailleurs, à cet égard, je doute que les comportements issus de la pratique de l’art numérique soient vraiment plus dignes. Il s’agit souvent de s’amuser de manière superficielle avec tout ce qui entoure la technologie numérique, parce que c’est “cool” et que ça permet d’assurer sa place sur des blogs à succès.

London Fieldworks, Null Object: Gustav Metzger Thinks About Nothing, 2012. Photo: D.R.

Quelle serait, selon vous, la création nano technologique la plus représentative de ces dernières années ?
Je dirais tous les travaux de Frederik de Wilde qui touchent à la nanotechnologie. Sans doute parce qu’à ma connaissance ce projet artistique semble être le seul qui aborde et utilise la nanotechnologie tout en ayant du sens. D’ailleurs, je l’ai interviewé récemment et il s’est avéré être un artiste singulier, intéressant et réfléchi.

Quelles sont les expériences les plus significatives quant à l’usage des neurosciences dans les champs de la création ces dernières années ?
J’essaie de réfléchir à cette question depuis un certain temps déjà, mais les avancées scientifiques en neurosciences m’impressionnent toujours tellement qu’il me serait difficile de choisir une seule expérience artistique pour vous répondre en étant juste. Cependant, je peux vous dire que j’ai beaucoup aimé la collaboration entre Gustav Metzger et London Fieldworks pour l’exposition Null Object: Gustav Metzger Thinks About Nothing que j’ai vu à Londres en 2012. Metzger est un artiste d’avant-garde qui a lancé le mouvement d’art « auto-destructif » en 1959.

L’idée de l’art « auto-destructif » consiste grosso-modo à démolir l’œuvre d’art et à reconfigurer l’acte lui-même en tant qu’œuvre. London Fieldworks a demandé à Metzger de s’asseoir sur une chaise pendant 20 minutes et de ne penser à rien. L’activité électrique de son cerveau était mesurée pendant qu’il était assis. Les électroencéphalogrammes ainsi obtenus ont été analysés et transformés en instructions envoyées à un robot industriel pour qu’il perce un trou dans un bloc de pierre. Il en a résulté un cube de pierre de 50 cm de haut contenant un « vide » qui représente ce qui se passe dans le cerveau de Metzger quand il ne pense à rien.

Régine Debatty, Claire L. Evan, Pablo Garcia, Andrea Grover, Thumb, New Art/Science Affinities, Miller Gallery, Carnegie Mellon University & CMU STUDIO for Creative Inquiry, 2011. Photo: D.R.

L’aspect in progress des projets de recherche présentés dans les événements d’art et de technologie n’est-il pas de nature à repousser le public de l’art contemporain ?
Vous croyez ? J’ai pourtant l’impression que ça produit l’effet contraire. Les œuvres en cours de réalisation offrent un aperçu de la démarche artistique (le concept de « processus » est assez répandu dans l’art). Elles vous permettent de réfléchir avec l’artiste à ce que pourrait devenir la dernière pièce. Je pense que le public de l’art contemporain connaît bien la notion du work in progress. Il faudrait peut-être chercher ailleurs l’explication du manque d’attrait de ce public pour les événements mêlant l’art et la technologie. Mais, là encore, je suis sans doute très naïve…

À la Biennale de Venise, doit-on se lamenter quant au manque évident de créations technologiques ou se réjouir de la présence d’un nombre croissant d’œuvres qui sont conséquentes au numérique ?
Je n’ai pas vu dernière édition de la Biennale de Venise, il me serait donc difficile de vous donner une réponse très éclairée à ce sujet. Cependant, lorsque je me rends à ce type d’événements, je ne cherche jamais exclusivement des œuvres liées, de près ou de loin, à la technologie. De toute façon, je suppose qu’il y en aurait très peu. Je recherche plutôt un art de qualité ou du moins qui me touche. C’est toujours ma démarche, que je sois à FutureEverything ou à la Biennale de Venise.

Dominique Moulon
(mars 2014, en ligne)
publié dans MCD #80, « Panorama », déc. 2015 / fév. 2016

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Commissaire d’exposition en Architecture et Design au MoMA

Paola Antonelli a étudié l’architecture et écrit sur le design avant de devenir commissaire d’exposition au sein du département d’Architecture et de Design du Musée d’Art Moderne de New York en 1994. Elle a enseigné la théorie à UCLA et Harvard, a publié l’ouvrage Masterpieces: Everyday Marvels of Design et codirigé l’édition du livre Design and the Elastic Mind.

Paola Antonelli. Photo: © Robin Holland.

Est-ce lorsque les designers abordent des questions sociétales ou politiques que vous les considérez comme des artistes ?
Pas du tout. Les designers doivent toujours faire face à des questions politiques et sociales. Ce sont les artistes, en revanche, qui en sont parfois très déconnectées. Or, la différence entre le design et l’art est de moins en moins intéressante dans la mesure où beaucoup de designers utilisent les outils des artistes et certains artistes se réfèrent au design. Mais il est certain que les artistes ont le choix entre être responsables ou non à l’égard d’autres humains tandis que les designers doivent l’être par définition. Ainsi les designers, même lorsqu’ils fabriquent un iPhone, accomplissent un acte politique. À l’inverse, les artistes sont parfois complètement détachés du monde réel. Ceci dit, je ne connais pas suffisamment l’art pour en parler. Je connais très bien le design et l’architecture, alors quand les gens me posent des questions sur la relation et les différences entre le design et l’art, je m’en tiens à aborder ce rôle de responsabilité.

N’êtes-vous pas, au fil du temps, devenue experte dans les designers ne concevant ni mobilier ni véhicule ?
Ce n’est pas délibéré. C’est juste qu’il y a de moins en moins de meubles véritablement intéressants et qu’à la place on trouve énormément de choses passionnantes dans le domaine numérique. Je ne fais donc pas un rejet du mobilier ni des objets, mais je suis peut-être devenue plus exigeante à leur encontre. La période actuelle n’est sans doute pas idéale pour le design de meubles. Je pense que la culture, dans son ensemble, est devenue plus exigeante. Nous semblons tous vouloir davantage de substance et pour qu’un livre ou un objet existe nous lui demandons aussi une plus grande justification. Ainsi, nous identifions les déchets comme inutiles et reconnaissons, a contrario, un objet qui ajoute de la pertinence au monde. Cela pourrait expliquer pourquoi je suis devenue plus exigeante vis-à-vis des objets.

Museum of Modern Art, A Collection of Ideas, 2014. Photo: © Jonathan Muzikar.

Les meubles et les voitures incarnent le stéréotype que la plupart des gens associent au design. C’est pourquoi je m’en prends toujours aux meubles, aux voitures et aux véhicules. Mais en vérité, beaucoup de design de qualité est mis en œuvre, par exemple, dans l’infrastructure des véhicules. Si vous pensez aux voitures sans conducteurs, même si la voiture n’a rien de remarquable en elle-même, le design de l’infrastructure qui l’entoure est très intéressant. Ainsi, la grande réussite des designers et des architectes au cours des dernières années est de s’être débarrassés de l’entrave que représente l’échelle. Du point de vue du design, vous pouvez concevoir des réseaux, un objet, un véhicule, mais en réalité, la plupart des objets sont accessibles à travers des réseaux et des systèmes.

Acquérir des créations aux technologies variables dans un musée ne revient-il pas à collecter des instructions ou documentations plus que des objets ?
C’est vraiment intéressant. Je dirige un département de recherche et développement et nous organisons des salons sous forme de discussions qui abordent des sujets pertinents pour la société dans lesquels le MoMA se spécialise. Nous venons d’ailleurs d’en organiser un sur les objets hors-ligne, qui voient le jour sous forme numérique et deviennent ensuite des objets physiques. L’un de mes collègues, David Platzker, du département des Estampes et Dessins, a fait une excellente présentation sur le monde pré-numérique, abordant la manière dont les artistes faisaient de l’art en suivant des instructions. Il est donc amusant que vous souleviez cette question, car elle ne touche pas seulement le monde du numérique ; elle existait bien avant lui.

Museum of Modern Art, A Collection of Ideas, 2014. Photo: © Jonathan Muzikar.

En un sens, on peut dire que la façon dont nous acquérons le numérique d’aujourd’hui est similaire à celle dont l’art conceptuel a été acquis, car dans sa majorité il reposait sur des instructions. Aujourd’hui, si nous voulons acquérir des objets numériques, nous devons être très redondants. Par exemple, lorsque nous faisons l’acquisition d’un vieux jeu vidéo (comme Asteroids) l’opération consiste à en acquérir le code source (lorsque c’est possible), mais aussi la borne d’arcade, car même si nous ne la montrons pas, nous filmons des gens en train de jouer dessus. Nous sommes également très attentifs à l’acoustique. Ensuite, nous acquérons les émulations logicielles. En outre, si le programmeur/designer original est toujours en vie, nous nous entretenons longuement avec lui. Ainsi, nous possédons cette gamme d’éléments différents, tous très importants dans l’optique d’une conservation future. Bien sûr, ces éléments ne sont pas nécessaires pour la simple exposition du jeu en galerie, mais notre mission, en tant que musée, est de les préserver. Nous sommes donc extrêmement redondants et rassemblons des instructions et de la documentation.

Les technologies utilisées par les artistes de leur temps sont aussi celles du monde de l’entreprise. Est-ce pour cette raison que leurs pièces entrent au musée par le département design ?
Je m’intéresse à la technologie et je ne me soucie pas du monde de l’entreprise. Il est vrai que j’ai parfois accès aux technologies avant même qu’elles n’entrent dans le domaine de l’entreprise. On peut penser, par exemple, à Processing de Casey Reas. Cependant, il vaudrait mieux poser cette question à un commissaire d’art, car en ce qui me concerne, la technologie est une composante très naturelle du design et puisque je m’intéresse personnellement au design contemporain, je suis toujours attirée par les nouvelles technologies. Je gravite vers elles et j’attends que surgisse une expression pertinente du design appliquée à ces nouvelles technologies. Par exemple, je trouve Casey Reas pertinent et j’ai montré son application Processing, mais je n’ai pas montré ses fractales artistiques parce que, selon moi, il s’agit d’art. Je tiens vraiment à exposer du design et de l’interaction. Certaines personnes ont pu entrer au musée par la porte du design parce que les commissaires de design sont plus réceptifs, mais lorsqu’elles font de l’art, nous les laissons aux commissaires d’art.

Museum of Modern Art, A Collection of Ideas, 2014. Photo: © Jonathan Muzikar.

Selon quels critères le résultat d’une recherche alliant l’art à la science doit-il être exposé dans un musée d’art contemporain plutôt que dans un musée des sciences ?
Tout d’abord, chaque fois que mon nom apparaît, c’est toujours à propos de design, jamais d’art. Je pense que la relation entre l’art et la science est plus compliquée, à cause de l’esthétique. La relation entre le design et la science est vraiment formidable. J’ai organisé une exposition, il y a quelques années, intitulée Design and the Elastic Mind, qui tentait de mettre en relation directe des designers et des scientifiques, et j’ai vraiment adoré ce projet. Dans ce cas, il était clair qu’il s’agissait de design, d’esthétique, d’une intention d’interaction. Il ne s’agissait pas seulement d’un modèle scientifique. L’élégance, elle aussi, était transmise tout comme l’aura liée au fait d’ajouter quelque chose au monde. Parmi les meilleurs endroits qui génèrent ce sentiment, on compte la Science Gallery, à Dublin. C’est un musée des sciences fantastique en ce que le design fait partie intégrante de son ADN. Il s’agit donc vraiment d’une formidable alliance, parce que la question  »et si ? » est posée à la fois par les scientifiques et les designers, ce qui est fabuleux.

Un autre endroit de ce type est l’aile Welcome au Science Museum de Londres. Là encore, des collaborations incroyables se produisent entre designers et scientifiques. Sans oublier, bien sûr, le Welcome Trust d’Euston Square, à Londres, le Laboratoire, à Paris… Voilà ce dont je veux parler : du design et de la science, sans l’intercession de l’art. Vous pouvez voir où se situe la connexion. Je pense que lorsque les scientifiques travaillent avec des designers, ils se sentent heureux parce qu’ils ne subissent plus la pression ni l’examen critique de leurs pairs lié à la démarche scientifique. Ils sont donc libérés d’une rigueur absolue. Les designers, quant à eux, aiment vraiment avoir accès à des outils de pointe pour envisager des futurs possibles. C’est donc une excellente relation, qui s’intègre parfaitement à un musée d’art ou de design, mais qui pourrait tout aussi bien s’inscrire dans un musée dédié aux sciences. Il s’agit de nouveaux modèles de musées, au-delà de l’opposition obsolète entre les musées des sciences et d’art.

Museum of Modern Art, A Collection of Ideas, 2014. Photo: © Jonathan Muzikar.

Comment présenter des créations à échelle nanométrique ?
J’en ai exposé, mais je ne les ai pas collectionnées. Je les ai montrées à l’aide de photos prises au microscope électronique, il s’agissait donc exclusivement de représentations. C’est un peu comme l’architecture : dans un musée, vous ne pouvez jamais montrer l’architecture réelle, vous en exposez toujours des représentations. D’autant qu’à échelle nanométrique, il ne peut s’agir que d’une représentation, car l’optique cesse de fonctionner et doit être relayé par un microscope spécial qui envoie des électrons, puis reconstruit l’image numériquement.

Comment valoriser les cultures de l’Open Source dans un musée dédié à l’art ?
Dans ce cas, puisqu’il s’agit d’un musée d’art, vous devez toujours aussi prendre en compte l’esthétique et l’élégance. Pour moi, il ne s’agit pas de beauté, mais d’intention esthétique. Il doit y avoir une intention. Il est vrai que nous avons acquis un (voire plusieurs) projet Open Source. Nous avons également acquis des projets issus de financement participatif (crowdfunding). Nous avons notamment acquis le projet Open Source EyeWriter. Pour moi, la raison de l’acquisition d’EyeWriter, même si sa beauté ne saute pas aux yeux, c’est qu’elle est presque transcendantale. C’est un parangon tellement incroyable de la générosité dont l’Open Source est capable quand il est bien pensé et des meilleures intentions du design, que j’ai décidé de l’acquérir.

Museum of Modern Art, A Collection of Ideas, 2014. Photo: © Jonathan Muzikar.

Le MoMA tend à être un musée très positiviste. Le V&A a acquis un pistolet imprimé en 3D, ce que je ne ferai jamais. Je pense que le pistolet imprimé en 3D n’est pas seulement funeste ou pour le moins problématique, mais c’est aussi très laid. En fait, je travaille sur un projet en ligne sur le design et la violence. Dans ce projet, nous avons mené un débat dans le style d’Oxford de style sur le pistolet imprimé en 3D, mais la discussion s’est axée sur l’Open Source. Les deux acteurs du débat étaient le designer de l’arme imprimée 3D et Rob Walker. Je pense qu’il est important pour un musée de s’attaquer à l’Open Source mais, encore une fois, il ne faut pas que ce soit en vertu d’un effet de mode. Vous devez attendre afin de trouver un objet en Open Source qui soit un bon ajout au musée. Il s’agit toujours de trouver l’élément pertinent.

Dominique Moulon
(le 24 juin 2014, en ligne)
publié dans MCD #80, « Panorama », déc. 2015 / fév. 2016

les mythologies du not yet
storytelling et recherche de pointe en impression 3D

Elles s’inspirent autant des êtres imaginaires de Borges, qu’elles empruntent à l’ADN des massifs coralliens : entre préciosités plastiques et prothèses organiques pour les décennies à venir, les « Mythologies du Not Yet » (pas encore) de Neri Oxman brouillent les pistes entre l’investigation scientifique et l’utopie fantastique. Véritables transgressions entre art, sciences et design, ces impressions 3D dont les secrets de fabrication s’élaborent entre les laboratoires de la Côte Est (USA), Israël et la Norvège, entre chercheurs algoristes, biologistes, ingénieurs et chimistes, sont pour Neri Oxma, artiste enseignante au MIT, les totems expérimentaux d’une nouvelle révolution en cours.

Levianthan. Issu des Êtres imaginaires, Mythologies du Pas Encore de Neri Oxman. Centre Pompidou, 2012. Photo: D.R.

Conçues dans le cadre de l’exposition Multiversités Créatives mise en œuvre par Valérie Guillaume au Centre Pompidou, les créatures de Neri Oxman interpellent le visiteur : de quelle matière sont-elles faites ? Du verre ? Du plastique injecté ? De l’acrylique, de l’encre ou tout autre chose ? Ces torses, ces casques ou ces hanches qui, telles des prothèses pour super héros, exhibent les fonctions vitales à la surface du corps font-elles partie d’une collection haute-couture inspirée par des recherches en bio-mimétisme, ou sont-elles l’objet de mutations produites en laboratoire par une apprentie sorcière, mue par une esthétique baroque singulière, entre Art Nouveau et la SF d’un Giger ?

Multiversités créatives : générer, fabriquer, représenter
Architecte, docteure en design computationnel, dotée d’une formation à l’école de médecine de Jérusalem, Neri Oxman est aujourd’hui enseignante au Massachussetts Institue of Technology, où elle dirige le groupe de recherche Mediated Matter (le matériau comme médiation), dont la quête consiste à renforcer la relation entre objets, environnements naturels et construits, en injectant dans les champs du design numérique et des nouvelles technologies, des principes de conception inspirés par la nature.

Le fruit de ses recherches fut couronné par de nombreux prix et présenté dans différentes biennales (Venise 2002-2004, Beijing 2009-2010) et institutions telles que le MoMA de New York, le musée des Sciences de Boston, le Smithsonian Institute ou en France, le Frac d’Orléans. Mais c’est au Centre Pompidou à Paris qu’elle offre, en 2011, une pièce originale nommée Stalasso réalisée en collaboration avec Craig Carter professeur au département des Sciences matérielles et de l’ingénierie du MIT.

Stalasso. Expérimentations sur formations de structures tubulaires. Neri Oxman & Craig Carter, Musée des Sciences de Boston 2009. Photo: D.R.

Stalasso fut l’objet d’une première rencontre avec Valérie Guillaume, commissaire responsable du Centre de Création Industrielle à Beaubourg : créé en 2000, le service de prospective s’est donné pour mission d’explorer les processus de création, pas seulement en terme de fabrication des objets, mais de nouveaux systèmes d’organisation de la conception, dans le domaine du design, de l’architecture et des nouvelles technologies.

Bâtie autour de trois axes — « générer, fabriquer, représenter » — l’exposition Multiversités Créatives propose, à l’heure du big data, une réflexion sur le futur de l’industrie; qu’il soit fondé sur des modèles de conception et d’innovation computationnelles tels que les Fab Lab ou tout autre processus capables d’engendrer des formes et structures susceptibles de renouveler nos expériences quotidiennes, cognitives, imaginaires ou esthétiques.

Le coup d’envoi est donné en septembre 2011, lorsque Valérie Guillaume sollicite l’équipe de Neri Oxman, au même titre qu’une vingtaine d’architectes et artistes designers de sa génération (nés fin des années 70’s, début 80’s), quant à la conception et la production de pièces originales pour une exposition annoncée en mai 2012.

Neuf mois plus tard, l’enfant prodige du MIT épaulée par son confrère Craig Carter, revient à Paris avec 18 prototypes : 18 créatures en volume dont la complexité n’a d’égale que le foisonnement des connaissances qu’elles mettent en œuvre : à la croisée des sciences, des technologies contemporaines et des mythes universels qu’elles incarnent.

Pneuma. Zoom sur les textures. Les couleurs correspondent à différents matériaux et critères d’élasticité. Issu des Êtres imaginaires, Mythologies du Pas Encore de Neri Oxman. Centre Pompidou, 2012. Photo: D.R.

Bio-mimétisme et Cryptozoologie : les algorithmes de vie
Ce qui fascine dans le bestiaire extraordinaire de Neri Oxman c’est qu’il explore le processus même qui conduit à la vie, à la forme et la fonction. Dans la série Pneuma, qui fait référence aux organes respiratoires autant qu’à l’enveloppe de l’âme, Oxman s’inspire de la structure alvéolaire poreuse des éponges pour modéliser un bustier protecteur de la cage thoracique, usiné à partir de composants aux propriétés mécaniques à la fois résistantes, tendres et flexibles, qui permettent à l’air de circuler.

Dans une autre famille fonctionnelle, l’artiste designer fait référence à la puissance du Léviathan, dont les caractéristiques du serpent marin sont détaillées dans le livre de Job : elle introduit, par exemple, dans la conception interne de cette deuxième peau (Leviathan 2), un système de rainurage vertical qui donne au corps toute sa souplesse sans perdre de sa force, lors de torsions. La combinaison des couleurs nous instruisant sur la complémentarité des composants qui constituent ces créatures insolites.

Outre les enseignants chercheurs du MIT, conseillés par le Wyss Institute d’Harvard University, quatre autres équipes d’ingénierie industrielle ont planché sur les objets fantasmés d’Oxman : the Math Works, l’éditeur de logiciels scientifiques, The chaos group, spécialiste du rendu 3D, et le norvégien Uformia qui oriente de plus en plus son activité sur le dessin et la conception d’objets 3D, voués à l’impression.

Pneuma. Zoom sur les textures. Les couleurs correspondent à différents matériaux et critères d’élasticité. Issu des Êtres imaginaires, Mythologies du Pas Encore de Neri Oxman. Centre Pompidou, 2012. Photo: D.R.

Et c’est grâce à l’équipe R&D d’Objet Geometries, basée à Tel-Aviv, que cette progéniture allégorique verra la lumière du jour. Partenaires incontournables du projet, ces maîtres d’une impression 3D fondée sur des machines à jet d’encre ont travaillé plus spécifiquement avec l’artiste sur la mise au point d’algorithmes et l’élaboration de cartouches de résine capables de produire des motifs de couleur en trois dimensions.

Depuis 1998, les chimistes d’Objet développent pour leurs imprimantes, toute une gamme de matières — des photopolymères à base d’acrylique les plus rigides, permettant de simuler le verre, aux plastiques techniques les plus élastiques —, dont ils décuplent les possibilités de texture et de rendus par un éventail de tonalités et une spécificité d’impression capable d’envoyer deux jets de matière simultanés. Ce qui nous motive dans le travail d’Oxman, c’est cette capacité à s’affranchir des contraintes inhérentes au design industriel, et de pousser le processus créatif au-delà des limites technologiques actuelles, explique Éric Bredin, responsable marketing d’Objet pour l’Europe.

Identifiée comme « Esprit révolutionnaire » par nos confrères du magazine scientifique Seed, Oxman a choisi pour autoportrait, le mythe d’Arachné : telle l’araignée dont les glandes séricigènes peuvent tisser jusqu’à six fils de soie différents, l’architecte transgresse avec élégance les frontières entre art, science, littérature et design, persuadée que nous sommes à l’aube d’une révolution industrio-culturelle aussi puissante que l’imprimerie de Gutenberg.

Véronique Godé
publié dans MCD #80, « Panorama », déc. 2015 / fév. 2016

critique d’art et commissaire d’expositions

Domenico Quaranta est un critique d’art et commissaire d’expositions spécialisé dans les nouveaux médias. Il écrit régulièrement pour Flash Art et est notamment l’auteur de l’ouvrage Media, New Media, Postmedia. Vivant et travaillant en Italie, il enseigne le Net Art à l’Accademia di Brera de Milan.

Domenico Quaranta. Photo: © Rinaldo Capra.

Qu’il s’agisse de l’émergence d’une œuvre ou d’une exposition, d’un livre ou d’un centre d’art, quel est selon vous l’événement historique le plus marquant quant à l’émergence du numérique dans l’art ?
Je ne pense pas que cette émergence se soit réellement produite de manière autonome. Il est fort probable que chacun des événements historiques qui ont eu lieu ait accompli quelque chose en son sens et quelque chose à son encontre. Le ZKM organise de très bonnes expositions et sa collection présente aussi bien de l’art des médias que de l’art contemporain. S’agissant d’un livre, peut-être que sur le long terme je choisirais Art and Electronic Media d’Edward A. Shanken, publié par Phaidon. Ce livre est assez intelligent, car il n’aborde pas l’art des nouveaux médias comme un domaine séparé, mais il tente de rendre compte de l’utilisation des nouvelles technologies présentes dans le monde de l’art contemporain et le monde de l’art des nouveaux médias, à la fois en tant qu’outil et domaine de recherche. On y trouve Mario Merz et d’autres artistes qui abordent le travail sur la technologie de manière différente. De plus, grâce à sa maison d’édition, Phaidon, l’ouvrage a davantage de chances d’avoir un impact sur les séparations entre les médias.

L’art vidéo est une tendance du passé depuis que le médium vidéo est très largement admis dans les expositions d’art contemporain. N’est-ce pas ce qui est en train de se passer en ce qui concerne le numérique ?
Pour moi, l’art des nouveaux médias ou l’art numérique fait déjà partie du passé. Parfois, on continue à utiliser ces termes parce que c’est utile, mais c’est aussi dangereux pour les artistes. Considérant l’exposition d’Evan Roth à la galerie XPO, on y trouve des œuvres numériques, des œuvres des nouveaux médias, mais beaucoup d’entre elles sont en réalité totalement analogiques. Je pense que de nombreux artistes aiment vraiment faire de l’art sans que celui-ci soit défini par son support, ils veulent pouvoir se mouvoir entre différents médias et être libres d’utiliser tout type de support en fonction de leurs envies.

Domenico Quaranta, Beyond New Media Art, Link Editions, 2013. Photo: D.R.

Souvent, les œuvres médiatiques pénètrent les institutions muséales au travers des départements Design, comme c’est le cas au MoMA grâce à la présence de Paola Antonelli. Que pensez-vous de cette stratégie de la « porte de derrière » ?
Je lisais une interview de Paola Antonelli hier dans le train, sur l’intégration des jeux vidéo dans la collection du MoMA. Au moment où c’est arrivé, j’ai également songé qu’il ne s’agissait pas d’une reconnaissance du jeu vidéo en tant qu’art contemporain, car tout passait par le département Design. Mais dans l’interview, elle a dit quelque chose de pertinent à ce sujet. En substance, elle a dit que dans des musées comme le MoMA, on est tenu de faire des distinctions entre les différents domaines et d’avoir des conservateurs pour chaque domaine. Si ça n’était pas le cas, il serait difficile de les gérer. L’essentiel, toutefois, est que les choses parviennent à rentrer dans la collection. Lorsqu’elles font partie de la collection du musée, peu importe qu’il s’agisse de la section design, photographie ou médias. Je pense que c’est une bonne chose, même si ça ne révèle pas grand-chose sur l’art lui-même.

N’y aurait-il pas essentiellement deux tendances concernant l’usage des nouveaux médias dans l’art, l’une s’inscrivant dans la continuité de l’histoire de l’art, et l’autre étant davantage sociale ou sociétale ?
C’est, en fait, l’une des raisons pour lesquelles il me semble que l’étiquette « d’art des médias » ne rime plus à rien. Nous regroupons des éléments pour la simple raison qu’ils dépendent de l’utilisation d’ordinateurs, mais en réalité la manière dont l’ordinateur est entré dans le monde de l’art en tant que support, de nos jours, s’est tellement diversifiée et propagée qu’on l’utilise quasiment pour tout. Il est donc tout à fait naturel, à mon sens, que les artistes abordent les médias numériques et les nouveaux médias de manière absolument singulière. Certains effectuent une recherche sur le médium, d’autres l’utilisent simplement comme un outil, en parlent, ou en font leur sujet, mais parfois ils opèrent ainsi sans pour autant l’utiliser comme support. Ainsi, en un sens, toute tendance de l’art contemporain peut faire naître une application et un développement des nouveaux médias.

Evan Roth, blimp-on-deepskyblue.com, 2013. Photo: D.R. / Courtesy XPO Gallery, Paris, collection of Hampus Lindwall.

Nous sommes tous des utilisateurs d’outils et de services numériques. Mais n’est-ce pas, de manière générale, le détournement de ces mêmes technologies et médias qui fait œuvre ?
Il est certain que beaucoup de gens ont opté pour cette approche. Elle me semble intéressante, car elle génère une critique et une prise de conscience autour des éléments qui entrent directement dans nos vies, sans que nous y pensions, sans phase adaptation. Quand les smartphones sont arrivés sur le marché et que tout le monde a commencé à les acheter, nous n’envisagions probablement pas l’impact considérable que cela allait avoir sur nos vies. Il s’est agi d’une révolution absolue par rapport à l’utilisateur à l’ordinateur et la disponibilité d’Internet une décennie auparavant. À présent que nous avons accès à Internet à tout moment, en tout lieu, etc., cela modifie radicalement notre vie sociale, notre économie et ce qui en découle. Si les artistes abordent ce dialogue avec les nouvelles technologies en ayant une approche critique, c’est aussi parce qu’ils veulent nous rendre plus conscients de l’environnement dans lequel nous évoluons.

La thèse que vous rédigez en 2008/2009 s’intitule La guerre des Mondes en référence aux rapports entre l’art des nouveaux médias et l’art contemporain. Cinq ans plus tard, sommes-nous toujours en guerre ?
Je perçois encore beaucoup de conflits, pas nécessairement entre ces deux communautés prises dans leur ensemble, mais entre des opinions et des points de vue divergents. Ainsi, quand vous envisagez d’inviter des artistes représentés par une galerie à votre foire et que vous éprouvez des difficultés à les y intégrer parce qu’ils travaillent avec une galerie sur laquelle vous faites l’impasse, il y a une petite friction, car vous ne jouez pas selon les règles du monde de l’art contemporain.

Petra Cortright, winterlakecomentbounds_ber_nopolesCS5lol2[1], 2012, Photo: D.R. / Steve Turner Gallery, Los Angeles, collection of Hampus Lindwall.

L’Internet, qui a modifié nos modes de consommation, ne serait-il pas aussi de nature à changer radicalement notre rapport à l’art, l’œuvre, sa rareté ?
L’une des choses qui affectent le plus notre relation avec l’art, c’est le fait que nous soyons habitués à la documentation, à voir l’art à travers une documentation plutôt que par l’expérience tangible de l’art. Il se peut que nous visitions le même nombre d’expositions que nous le faisions avant Internet, mais notre expérience de l’art par le biais d’une médiation a explosé. Avant, on ne faisait que consulter des livres et des magazines, mais à présent, 90% de notre expérience de l’art passe par Internet.

L’émergence d’artistes de la génération que l’on qualifie de « post Internet », comme Petra Cortright au sein de grands événements d’art contemporain, n’est-il pas le signe de l’acceptation du numérique dans l’art ?
Petra est un bon exemple d’artiste qui utilise Internet à la fois comme outil et comme support de ses œuvres, mais en même temps, d’un point de vue technique, la plupart de son travail est, comment dire… très simple… Il s’agit d’une évolution de l’art vidéo dans un contexte d’art qui utilise Internet comme vecteur d’art vidéo. Le fait que Petra Cortright réussisse ne signifie pas que l’art des nouveaux médias sera accepté dans le monde de l’art parce qu’elle y est acceptée. Cela s’applique également, dans une certaine mesure, à d’autres artistes qui savent parfaitement jouer le jeu de l’art contemporain. En règle générale, lorsqu’ils réussissent, ils opèrent au sein de l’art contemporain et non dans l’art des nouveaux médias.

Peut-on se passer du marché si l’on souhaite extraire les pratiques artistiques numériques des réseaux associatifs aux événements éphémères ?

Je ne pense pas que cette communauté des nouveaux médias constituée d’associations et d’organismes à but non lucratif doive disparaître, car elle est capable de générer de l’expérimentation et des éléments qui ne seront pas acceptés par le marché de l’art. L’une des raisons pour lesquelles je n’aime pas traiter l’art des nouveaux médias dans son ensemble, c’est que je pense que ce terme, cette définition est encore très liée à des choses relevant de la recherche sur le médium, qui porte, notamment, sur l’utilisation des technologies de pointe. Lorsque vous faites de l’art avec un téléphone, un ordinateur ou Internet, vous opérez dans un domaine radicalement différent, un monde différent. Mais les technologies de pointe sont toujours présentes, il existe encore de nombreuses technologies et de nombreux outils auxquels les artistes ne peuvent accéder sans entrer dans un laboratoire ou le département de recherche d’une université. Il est important que cela continue d’exister, car cet aspect pousse l’expérimentation sur des éléments que le monde et le marché de l’art ne sont pas prêts à intégrer.

Si vous n’aviez qu’une œuvre à présenter qui représente selon vous la synthèse de l’art des nouveaux médias, laquelle choisiriez-vous ?
Je choisirais Jodi, jodi.org comme un tout, leur corpus. L’exposition regrouperait l’intégralité de ce qui a été montré sur jodi.org au cours des vingt dernières années. La raison, bien sûr, est que Jodi est apparu à ce moment charnière dans l’histoire de l’art des nouveaux médias, où les technologies de consommation ont émergé et ont permis aux artistes de faire un travail différent de ce qui avait été accompli au cours des décennies précédentes, entre les années 60 et 80. Si l’on traite de la relation entre les deux communautés et de la présence de l’art des nouveaux médias dans le monde de l’art et sur le marché de l’art, c’est aussi parce qu’à un moment donné, dans les années 90, il est devenu possible de travailler avec les nouvelles technologies de manière radicalement différente de ce qui était envisageable, par exemple, dans les années 80. En ce sens, je pense que Jodi est exemple représentatif de ce phénomène.

Dominique Moulon
publié dans MCD #80, « Panorama », déc. 2015 / fév. 2016

> http://domenicoquaranta.com

décembre 2015 / février 2016

 
> Édito :

Photos de famille

Petite pause dans notre longue série de dossiers thématiques avec cette collection de portraits d’artistes, de commissaires d’expositions, de directeurs de festivals et de galeries, de critiques d’art et de théoriciens des médias…

Un numéro à la fois singulier et pluriel, qui nous permet de revenir sur les multiples processus de création à l’ère du numérique.

Un panorama pour prendre du recul sur l’actualité et remettre en perspectives des pratiques, des interrogations et des passions liées aux nouvelles formes d’art de notre début de siècle mouvementé.

Une 80e édition pour le souvenir, avec quelques articles inédits et beaucoup d’archives exhumées des limbes du web qui (re)deviennent ainsi pérennes sur papier…

Laurent Diouf — Rédacteur en chef

> Sommaire :
Artistes / Commissaires d’expositions / Directeurs de festivals / Critiques d’art / Théoriciens des médias / Directeurs de galeries…

> Les contributeurs de ce numéro :
Dominique Moulon, Laurent Catala, Laurent Diouf, Maxence Grugier…