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interview de Marc Dusseiller

Séance de travail / Lab. Photo: © Hackteria. > www.hackteria.org

Pourriez-vous me parler de l’histoire d’Hackteria et de la manière dont elle a évolué au fil des ans ?
Nous nous sommes rencontrés tous les trois à Madrid à l’occasion d’un grand workshop, organisé par le Medialab Prado et qui s’appelait « Interactivos?09: Garage Science », sur la manière dont l’open source et l’approche scientifique citoyenne peuvent changer la société. Au cours de ce workshop, nous avons conclu que nous avions besoin d’une organisation et d’activités aptes à combler l’écart entre les pratiques populaires du bio-art et l’approche scientifique émergente du DIYbio/citoyen. Yashas a par la suite trouvé ce drôle de nom : Hackteria. Nous avons organisé le premier workshop Hackteria à Berlin sur la façon d’utiliser la microscopie DIY (à faire soi-même) pour des interfaces sonores. En 2010, HackteriaLab a lancé une série de rencontres entre experts, pour évaluer ce qui a été accompli et initier de nouvelles collaborations. En ce moment, à Lucerne, Urs Gaudenz travaille en étroite collaboration avec SGMK sur de nouveaux workshops relatifs aux infrastructures de laboratoire. Ensuite, il y aura Brian Degger qui a co-fondé un hackerspace à Newcastle comprenant de nombreuses expériences bio-ludiques, puis Rudiger Trojok, un geek DIYbio allemand qui viendra en avance à Copenhague pour préparer des workshops dans le hackerspace local, BiologiGaragen. Enfin, il y aura Denisa Kera, qui est en train d’initier une sorte de collaboration entre Brmlab, un hackerspace basé à Prague, et le hackerspace de Singapour.

Pourquoi Hackteria attache tellement d’importance au monde extérieur aux laboratoires ?
Au lieu d’avoir un seul laboratoire scientifique citoyen, conçu comme un hackerspace typique, nous avons développé une stratégie de laboratoires mobiles qui peuvent être installés et transportés partout dans le monde: dans des ateliers d’artistes, des centres d’art, ou des lieux inattendus comme la jungle ou même des rues d’Indonésie où nous avons d’ores et déjà réalisé et développé quelques expériences scientifiques. Les laboratoires mobiles nous aident à comprendre la manière dont ces technologies du futur vont interagir et influencer notre pratique et notre vie quotidienne dans des contextes très variés. La plupart des travaux d’Hackteria sont axés sur les processus et sont en mode ouvert. Nous aimons improviser dans de nouveaux lieux et avec de nouvelles personnes, ce qui a débouché souvent sur des projets créatifs et inattendus. Faire de la « science » et expérimenter avec des technologies à la manière DIY, en pleine rue, dans des centres d’art ou d’autres lieux nous aide à appréhender les défis, les limites et la façon de créer des outils et des processus qui permettent à plus de gens de profiter de la recherche et de bidouiller grâce à un savoir « expert ».

Pourriez-vous décrire quelques-uns des projets récents d’Hackteria qui incarnent ce type de vision et de pratique ?
Plus d’une douzaine de personnes contribuent à notre wiki en décrivant leurs projets en cours de production. En ce moment, il y a plus de 45 projets, allant d’instructions simples sur la façon de construire une infrastructure de laboratoire jusqu’à des descriptions plus sophistiquées de protocoles de laboratoire sur les méthodes de travail appliquées aux différents systèmes vivants. Vous pouvez y apprendre quelques techniques DIY de base pour cultiver des bactéries et des algues ou bien démarrer votre projet personnel de microscopie avec un simple jeu d’instructions pour transformer une webcam ou un appareil photo Eye Playstation3 bon marché en microscope bricolé. Le projet de microscopie est non-seulement très populaire, mais aussi très utile pour les amateurs de science, les artistes, mais aussi les habitants de pays en voie de développement qui ont un accès limité au matériel de laboratoire coûteux. Le projet de microscopie est également un bon exemple de la façon dont nous travaillons, nous aimons pirater l’électronique et les outils grand public pour les utiliser différemment. Nous transformons ces symboles de notre asservissement à l’industrie des médias en matériel de laboratoire émancipateur, permettant à chacun de découvrir et d’observer la nature et en particulier le monde des micro-organismes.

Ars Daphnia Circus. Photo: © Hackteria. > www.hackteria.org

Dans quelle mesure avez-vous constaté le développement d’autres thèmes et pratiques au cours de ces années ?
Nous avons entamé d’autres projets en bio-électronique mais nous comptons également poursuivre notre travail sur la microscopie DIY et la biologie synthétique. Nous aimerions faire des expériences avec des biocarburants et à cet effet nous construisons, grâce à Arduino, un bioréacteur qui servira à cultiver des algues. Beaucoup de nos membres restent très engagés dans la fermentation de vins et divers projets relevant du jardinage. Le projet de microscopie évoluera probablement vers des tentatives d’impression 3D de champignons ou de bactéries à l’aide d’une bio-imprimante. Les outils de laboratoire, tels que les incubateurs, les pipettes ou les centrifugeuses sont encore au cœur de nos activités, parce qu’il me semble essentiel de pouvoir mettre en place un laboratoire où que l’on se trouve. Au cours de l’année dernière, j’ai construit des kits simples pour « lab-in-a-box », une valise portable de biohacker. En Janvier dernier, en Indonésie nous avons même transformé une camionnette ambulante de vente de nourriture en un biolab semi-fonctionnel, avec lequel nous avons réalisé des expériences scientifiques simples qui utilisaient des microscopes, la stérilisation, mais aussi des expériences de gastronomie moléculaire, comme la sphérification.

Pourriez-vous expliquer ce qu’est l’art biologique en Open Source et en quoi il se rapporte à la biologie DIY ?
Qu’il s’agisse d’un wiki ou d’un workshop, cela n’a pas vraiment d’importance, ce qui compte c’est de permettre aux personnes de collaborer et de partager des connaissances et des instructions. L’Art Biologique en Open Source permet aux gens d’effectuer des protocoles scientifiques complexes sans l’appui d’une institution officielle. Nous croyons qu’il est important de rendre davantage de personnes confiantes lorsqu’elles sont amenées à travailler sur des systèmes vivants pour faire émerger de nouvelles idées créatives. Lorsque cela s’applique à la science et à l’art, un nouveau type de participation du public et de compréhension de ces deux domaines peuvent ainsi voir le jour. Actuellement, les artistes partagent peu d’informations précises sur le processus de fabrication de leurs pièces. Ils pensent volontiers que la documentation de leur mode opératoire n’est pas importante et que le rôle du public est d’être simple spectateur, consommateur passif et admirateur de leurs œuvres. À cet égard, les soi-disant bioartistes rappellent ces scientifiques qui construisent leurs tours d’ivoire. Nous trouvons que c’est archaïque et déplacé, car cela donne la fausse impression que la science et l’art sont pratiqués par quelques experts et membres d’une élite qui décident de notre avenir. Notre approche est radicale, nous souhaitons que tout le monde soit activement impliqué dans l’avenir de la biologie et de la science et que les amateurs, les bidouilleurs et les hackers aient un accès équitable aux outils de « production » d’art et de science.

Pourquoi est-il important de combler le fossé entre artistes et scientifiques et comment ceci est-il lié aux débats sur la relation entre experts et amateurs ?
Je m’intéresse beaucoup à l’amélioration de la communication scientifique et à la participation du public aux sciences de la vie. Je voudrais voir apparaître une démocratisation de la science qui fasse directement appel aux citoyens au lieu d’abandonner le débat à quelques ONGs, à des médias ou des professionnels de la communication scientifique qui, en tant que porte-paroles, édulcorent leur opinion. Mon espoir est qu’en permettant à davantage de gens de faire de la science dans leurs garages, leurs cuisines et leurs salles de bains, et en permettant à davantage d’artistes, de designers et de passionnés de travailler tout simplement sur divers projets scientifiques, nous pourrons aboutir à ce que le public maîtrise la culture scientifique et rende démocratiques les décisions sur les cellules souches embryonnaires, les OGM, les nanotechnologies, etc.

Maja Spela Incubator. Photo: © Hackteria. > www.hackteria.org

Quel est votre rapport à la scène du DIYbio ? Sur quel type de projets avez-vous collaboré et en quoi êtes-vous différents ?
Hackteria a rejoint le mouvement mondial du DIYbio dès le départ et nos activités ont toujours été menées de front. Il y a deux ans, alors que DIYbio.org débutait à peine, j’ai rencontré Mac Cowell, le fondateur du mouvement, et je l’ai invité à l’une de nos universités d’été. Nous collaborons et nous nous entraidons assez fréquemment. La différence réside peut-être en ce que DIYbio.org ressemble davantage à une liste de diffusion dotée de nombreuses fonctions alors que nous sommes avant tout un wiki qui dispense des conseils pratiques pour fabriquer des choses, mais nous organisons aussi de nombreux workshops et événements, ce qui intéresse moins le noyau dur du mouvement DIYbio. Par ailleurs, ils sont beaucoup plus tournés vers la science et l’aspect commercial alors que nous travaillons plutôt avec des artistes, des designers et même des philosophes. Les ressources éducatives et le wiki d’Hackteria sont essentiels pour aider les artistes et les designers à gagner en confiance pour pouvoir ensuite rejoindre une liste de diffusion liée aux sciences, poser des questions plus pertinentes et communiquer avec des scientifiques. La relation entre Hackteria et DIYbio crée cette belle synergie et la possibilité de soutenir des collaborations uniques.

Pourriez-vous expliquer votre vision de la relation idéale entre scientifiques professionnels et scientifiques citoyens ?
Lorsque j’ai rendu visite pour la première fois à Yashas, en Inde, j’ai réalisé à quel point le travail DIYbio que nous faisions dans les pays en développement est important. Le matériel scientifique y est trop cher et les publications scientifiques quasiment inaccessibles. Le wiki Hackteria permet aux étudiants de ces pays d’acquérir des compétences en matière de recherche grâce aux quelques outils DIY que nous avons développés (et nous développons constamment de nouveaux outils). Beaucoup de nos membres sont en fait des scientifiques professionnels qui ont pris le défi du DIYbio au sérieux. Ils prennent du plaisir à développer des instructions et des outils destinés à ceux qui, pour diverses raisons, n’ont pas de moyens suffisants ou d’accès à un espace laboratoire professionnel. Les outils DIYbio n’aboutiront sans doute jamais à une recherche de pointe, mais ils jouent un rôle essentiel dans la formation de scientifiques et finalement de tous ceux qui essaient de comprendre ce qui se passe dans les laboratoires scientifiques professionnels. Les protocoles et les outils DIYbio sont des moyens d’émancipation pour la science, un genre de liberté individuelle et même le droit de développer sa propre relation aux connaissances scientifiques et d’essayer de nouvelles choses pour pouvoir se forger une opinion éclairée sur ces questions. Le fait de pirater et de fabriquer des outils bon marché pour commencer son propre laboratoire et son infrastructure a pour but de démocratiser la science en ce sens. Une opportunité est ainsi créée pour les pays en voie de développement d’améliorer leur enseignement des sciences et de la recherche adapté à leur besoin, et non pas à quelques chroniques pour initiés dans les pages d’une revue occidentale de toute façon inaccessible.

Quelles sont les personnes qui participent à vos ateliers ?
Cela dépend du lieu et de la situation géographique. Si c’est un festival d’arts des médias, la majorité des participants sont des artistes « tournés vers la technologie et les sciences” et quelques ingénieurs qui travaillent sur un projet artistique, mais surtout ceux qui n’ont pas beaucoup d’expérience en matière de biologie, de sorte qu’ils cherchent à apprendre et découvrir des choses nouvelles dans un environnement convivial. Nous travaillons aussi parfois avec des enfants. En Inde ou en Indonésie, nous avons également réussi à attirer les villageois et les communautés locales et nous travaillons régulièrement avec des organisations locales de ces pays dont les objectifs sont similaires. En Indonésie, il existe des organisations telles que HONF (House of Natural Fiber) et Lifepatch.org qui travaillent souvent avec des agriculteurs locaux et utilisent certaines méthodes d’Hackteria, comme notre microscope bricolé à partir d’une webcam ou des protocoles destinés à la fabrication de vin et d’engrais. Yashas travaille également en collaboration avec des villageois indiens en enseignant la manipulation génétique et la biologie synthétique à l’aide de bandes dessinées qui s’adressent au grand public.

Plant Smela. Photo: © Hackteria. > www.hackteria.org

Parlez-nous de vos projets personnels avec Hackteria…
Ces deux dernières années, j’ai beaucoup travaillé en Slovénie sur les nanotechnologies et la biologie, avec Kapelica Gallery, une institution de premier plan, à la croisée de l’art et de la science. Nous avons commencé avec le projet NanoSmano en 2010, un laboratoire participatif invitant le public à des expériences avec les nanotechnologies et leur potentiel esthétique. Pendant deux semaines, un petit groupe d’experts scientifiques et d’artistes ont travaillé sur le développement de prototypes de nanotechnologie et le laboratoire a été ouvert au public. Avec Kapelica nous prévoyons également une série de workshops avec des enfants et nous mettons en place un laboratoire mobile. Je suis également actif en Indonésie où, au cours des trois dernières années, j’ai organisé des workshops sur la microscopie DIY, la fermentation, la sensibilisation des écoles locales à la science, mais aussi des événements avec la scène artistique florissante, mêlant science et VJing. En même temps, un nouveau projet appelé Lifepatch.org a été lancé. C’est une initiative citoyenne d’art, de science et de technologie dotée d’un wiki très semblable au nôtre, mais rédigé en indonésien; ainsi nous coopérons sur de nombreux projets. Il est très gratifiant de voir la manière dont le réseau se propage, d’assister à sa mutation et son interaction à travers le monde.

Quel est votre point de vue sur l’avenir de la science citoyenne ?
Mon espoir est que si plus de gens fabriquent eux-mêmes des choses, en ayant une expérience directe et quotidienne des protocoles scientifiques, nous pourrons démystifier la science et ouvrir l’ensemble du processus de décision à davantage de personnes et d’opinions. Je pense que c’est la société du futur, celle dans laquelle je souhaite vivre, un endroit où des bricoleurs et des citoyens ordinaires pourront trouver de nouvelles utilisations et des fonctions inattendues à des technologies et des connaissances scientifiques, les pirater et les adapter à leurs rêves et à leurs vies sans attendre qu’une grande entreprise ou qu’un gouvernement décide de ce qui est bon ou sûr pour eux. Parce que je travaille aussi en tant qu’éducateur, j’ai l’occasion de voir comment l’attitude à l’égard des changements scientifiques se transforme par le biais de l’expérience directe. Je pense que les institutions scientifiques devraient consacrer plus d’argent à enseigner la pratique de la science et ouvrir leurs laboratoires au public, au lieu de payer des spécialistes en communication scientifique pour mener des campagnes de relations publiques qui ne font qu’amplifier les soupçons à leur encontre.

propos recueillis par Sara Tocchetti
publié dans MCD #68, « La culture du libre », sept. / nov. 2012

Hackteria est un réseau de personnes qui pratiquent la biologie DIY axé sur l’art, le design et la coopération interdisciplinaire. Le réseau a été fondé en 2009 par Yashas Shetty, Andy Gracie et Marc Dusseiller et comprend maintenant non seulement des scientifiques, des ingénieurs et des artistes, comme on peut s’y attendre, mais aussi des philosophes, des entrepreneurs et même des gourmets et des chefs. Hackteria opère à l’échelle mondiale sur une plate-forme Internet et un wiki dédiés au partage des connaissances, permettant à quiconque d’apprendre, mais aussi de tester différentes façons de pirater des systèmes vivants. Hackteria ne repose pas sur un espace physique et son objectif est de permettre à des artistes, des scientifiques et des hackers de collaborer et d’essayer différentes techniques de biohacking et de bio-art en dehors des laboratoires officiels et des institutions d’art, quasiment n’importe où dans le monde. Site: www.hackteria.org

Deux révolutions technologiques ont fondamentalement changé le monde au cours du dernier quart de siècle, l’une dans les Technologies de l’Information et des Communications (TIC) et l’autre dans la biotechnologie. La première est beaucoup plus connue, car elle fait partie intégrante de la vie quotidienne des habitants des pays développés. Son impact est immédiat et omniprésent.

Free Range Grain. Photo: © Critical Art Ensemble.

Les employés des entreprises de services, les bureaucrates, les technocrates, les hommes d’affaires et les étudiants consacrent une part croissante de leurs heures éveillées à rechercher sur un écran ou taper sur un clavier. La biotechnologie est en apparence beaucoup moins omniprésente. Elle semble éloignée de la vie quotidienne parce que son développement et sa production se déroulent derrière les portes closes du laboratoire et ne sont compris que par un groupe d’experts scientifiques. Comme nous le verrons plus loin, cette vision, bien que correcte, est en réalité limitée. Le Critical Art Ensemble va même jusqu’à dire que si la révolution des TIC est beaucoup plus spectaculaire, la révolution biotechnologique est assurément plus profonde et tout aussi omniprésente.

Le Critical Art Ensemble se rend compte que cette affirmation est très audacieuse, car d’un simple coup d’œil tout un chacun peut voir à quel point les TIC ont révolutionné le monde. Plus important encore, elles ont rendu possibles une forme définitive de capitalisme (le pan-capitalisme), une hégémonie économique d’envergure mondiale. Les marchés mondiaux imbriqués et interdépendants sont désormais une réalité dont découlent des institutions mondiales et transnationales qui ne fonctionnent sous aucune autre autorité que la leur. Avec l’utilisation de la virtualisation croissante de toutes formes dominantes de l’activité humaine — si nous parlons d’échange économique, de guerre, de divertissement, ou de sociabilité — même à un simple niveau, le pan-capitalisme réussit à produire une idéologie générale dominante à l’échelle mondiale (le néolibéralisme), dans laquelle les catégories d’entreprise et de profit sont devenues le prisme à travers lequel toute valeur est mesurée. Compte tenu de cet enveloppement spectaculaire, incontournable, idéologique et économique rendu possible par les TIC, comment ne pas admettre qu’il s’agit là de la plus importante des révolutions ?

Le Critical Art Ensemble pense que, comme pour tous les phénomènes spectaculaires, cette révolution est réductible à une question de quantité. La révolution (numérique) des TIC nous a finalement apporté le même genre de choses, mais sur une échelle beaucoup plus grande. Ainsi, bien que nous n’ayons jamais vu auparavant d’empire, de spectacle, ou de marchés mondiaux, nous avons vu des empires, spectacles, et marchés à grande échelle. D’autre part, la biotechnologie n’est pas seulement étendue dans ses nombreuses manifestations, elle est également véritablement nouvelle. Si l’on se base sur la quantité, la biotechnologie touche à tout ce qui est organique, ce qui la rend véritablement globale. Par exemple, son impact est constant dans la chaîne de l’approvisionnement alimentaire. En termes de vie quotidienne, les produits issus de la biotechnologie sont omniprésents, de nos cuisines à nos armoires à pharmacie et notre corps. Pour un petit groupe de personnes, la biotechnologie est la raison même de leur existence. Cependant l’importance réelle des biotechnologies repose sur leur qualité.

Le pan-capitalisme, comme toute autre forme de pouvoir avant lui, n’a jamais été en mesure de contrôler pleinement l’intériorité humaine. Il peut envelopper le corps et la conscience et essayer d’y faire pénétrer ses impératifs, mais il n’a jamais été capable de contrôler la pensée ou le désir de manière fiable. Certes, il a fait de grands progrès pour assoir sa position, mais aucune formule magique n’a jamais poussé les gens à désirer ce dont ils n’avaient pas besoin, ni à devenir serviles sans résistance. Même la plus simple des campagnes de publicité n’est jamais assurée de fonctionner. Elle peut parvenir à déplacer les désirs fondamentaux généralement ancrés dans les besoins humains, comme la nourriture, le sexe, le logement, l’appartenance et des états alternatifs de conscience sur des articles superflus, mais cela fonctionne uniquement sur du court terme et finit souvent par échouer complètement. Le flux continu de groupes de réflexion qui accompagne les campagnes de publicité est une preuve irréfutable de la conscience du capital vis-à-vis de cette incertitude. La biotechnologie peut aider à optimiser ce processus, non seulement par le biais des humains. Elle peut grandement aider à re-codifier tout système organique et toute créature afin qu’ils puissent davantage se conformer aux impératifs du pan-capitalisme.

Free Range Grain. Photo: © Critical Art Ensemble.

De nouvelles avancées dans la biologie moléculaire ont démarré ce ré-encodage de la vie. Pour revenir à l’homme, ces éléments intérieurs de la conscience que nous pensions impénétrables sont à présent un territoire ouvert. Les moyens de prendre les impératifs du néolibéralisme et de les transformer en prédispositions qui pourraient pousser vers l’extérieur pour établir des liens avec les indicateurs actuels qui poussent vers l’intérieur. Étant donné la propension du capital à optimiser et rationaliser tout ce qui y touche, on peut être certain que l’intériorité du corps est dans sa ligne de mire.

Depuis longtemps, le capitalisme a montré son intérêt pour une vie régie par l’ingénierie dont la plus grande férocité s’est manifestée dans le mouvement eugénique du début du XXe siècle. Le désir de déplacer les processus tâtonnants et aveugles de l’évolution et de les remplacer par des choix rationnels en phase avec les besoins du capitalisme est un rêve persistant. À présent, les connaissances et les moyens d’y parvenir sont disponibles. Déjà, de nombreuses espèces vivantes sont ré-encodées. Toutefois, la réponse à des besoins de puissance et la sélection pour la survie sont deux choses différentes. La sélection ne peut être que spéculative et comprise a posteriori, elle ne peut donc être conçue à l’avance, de sorte qu’on ne sait jamais quel genre de bénéfices ou d’inconvénients les ingénieurs apportent à des espèces données ou même à un système écologique. Même si ce problème était en quelque sorte évitable (et compte tenu des antécédents du capitalisme, ce serait surprenant), on peut être assurés que le capital vise à privatiser la vie elle-même. Une pensée alarmante, et un processus déjà bien entamé.

En dépit de ces tendances cauchemardesques, sous-produits du néolibéralisme, la biotechnologie pourrait avoir des conséquences utopiques. Si elle pouvait être retirée du contrôle des sociétés transnationales et des organisations militaires, elles pourraient être réorientées pour un travail d’intérêt commun. Pour ce faire, la biotechnologie doit être repensée et réutilisée comme autre chose qu’un outil de colonisation de la vie, et cela se produira uniquement si ceux qui se tiennent à l’extérieur de la vision directe, de la tutelle, ou du salariat des agents du capital sont prêts à s’engager dans ce défi (d’ailleurs, quelques scientifiques son disposés à aider les bio-hackers dans cette entreprise, mais ils sont rares). La tâche n’est pas facile : pour réussir, les participants devront retirer les œillères de l’entreprise et du profit. En outre, ils auront besoin de participer à cette activité d’une manière qui dépasse le plaisir de l’enquête et la satisfaction de la curiosité. Ceux qui en sont capables devront encadrer cette initiative comme une intervention délibérée contre une forme inacceptable de bio-pouvoir, ou plus positivement, comme un moyen d’inventer et de déployer de nouvelles formes de bio-politique.

Ce n’est pas de la science, mais cela y ressemble. Les formes de bio-intervention et de biohacking qui ont une valeur sociale se démarquent de la production des connaissances scientifiques, car, au contraire, elles s’efforcent de produire une politique qui s’oppose à la re-codification de la vie dans l’intérêt du pan-capitalisme. La production de la connaissance scientifique est hors de portée de ceux qui ne bénéficient pas d’indépendance financière. La science est une entreprise intensive au niveau du capital, qui coûte des millions, souvent pour produire des résultats incomplets. Le coût du matériel de pointe est prohibitif (généralement parce qu’il ne peut être optimisé en raison du faible nombre d’unités vendues) et le coût des matériaux liquides n’est pas plus abordable. Les réactifs biologiques, micro litre par micro litre, sont probablement les substances les plus chères au monde. En outre, cette entreprise exige une grande communauté ayant atteint un consensus sur ce qui constitue un processus légitimé de contre-vérification de la validité et de la fiabilité des résultats. Dans l’écrasante majorité des cas, ceux qui bricolent dans leur coin ne seront jamais en mesure de rejoindre ce club.

Compte tenu de ces limitations, que peut-on faire ? Pour commencer, si tout ce l’on souhaite c’est explorer les bases de la biologie moléculaire, cela ne peut se faire à un coût raisonnable que d’une manière limitée (en raison du coût des réactifs). L’un des domaines où le capitalisme excelle c’est l’optimisation des produits populaires pour faire baisser leur prix (malheureusement cette pratique apparemment positive est communément associée au pillage du travail des plus pauvres, des plus vulnérables, et des plus désespérés de la planète). Les outils de laboratoire de base tels que les incubateurs, les shakers, les centrifugeuses, les PCRs, les pipettes de précision, etc., sont facilement disponibles et abordables pour ceux dont le budget est limité (surtout si vous achetez du matériel d’occasion) ou bien, selon les préceptes de Graham Harwood, ceux qui n’ont pas d’argent peuvent piquer le matériel.

Free Range Grain. Photo: © Critical Art Ensemble.

En outre, de nombreux procédés ont également été optimisés et sont souvent disponibles sous forme de kits faciles à utiliser. Les laboratoires sont comme n’importe quel autre espace de travail capitaliste où l’ouvrage est entièrement stratifié. Il n’est pas optimal pour les gestionnaires (IP) de faire un travail de laboratoire. Ils doivent développer des théories, inventer des expériences, interpréter des résultats et rédiger des demandes de subventions. Ils ont besoin d’une main-d’œuvre bon marché, c’est-à-dire d’étudiants, plus communément surnommés « singes de laboratoire ». Ils ont besoin d’instructions faciles à suivre. Ce qui signifie pour les bio-hackers intéressés que, sans connaître la théorie de ce qui est produit, un résultat valide peut être atteint (alors non, pas besoin de doctorat !). Peut-être les gens veulent-ils savoir si les céréales de leur petit déjeuner sont faites à base de maïs transgénique : il existe un kit disponible à cet effet dans les magasins de fournitures scientifiques. Il suffit de suivre les instructions très détaillées. Cependant, vous devez vous assurer que votre laboratoire est correctement équipé pour le kit, et toujours vérifier ce qu’un kit donné nécessite avant de l’acheter. Les fondations sont maintenant posées : nous pouvons nous approprier le matériel, les processus et les quantités limitées de connaissances et les adapter à nos propres besoins.

Nous arrivons maintenant à la partie créative de notre processus. Que pouvons-nous faire avec des moyens modestes ? Pour répondre à cette question, le Critical Art Ensemble suggère de se tourner vers l’histoire de l’art afin d’obtenir des réponses. Et dans ce cas vers l’un des grands pirates de la culture du XXe siècle : Marcel Duchamp. Au début du XXe siècle, Duchamp a produit une série de sculptures toutes effectuées dans le but de déranger et perturber les croyances mythiques sur l’art, à savoir ce que les humains appellent l’art dans l’existence à travers un acte créatif transcendantal, au-delà de la sphère sociale. Duchamp croyait que l’art n’avait pas de qualités transcendantes ou essentielles, et le ready-made en était sa démonstration. Il a pris des produits fonctionnels manufacturés comme un porte-bouteille ou un urinoir et les a repositionnés comme étant de l’art. Estimant que le sens est déterminé par la situation, plutôt que par l’essence, il a placé les objets sur un piédestal, dans un musée ou une galerie, et les a signés. L’interrelation entre l’espace, le socle, l’objet, la signature et le spectateur signalaient à tous la légitimité du statut des objets en tant qu’art. Et en tant que tels, ils étaient considérés et traités comme de l’art. Cette reconfiguration des points signifiants pour produire de nouvelles relations aux objets communs est le modèle que les biohackers peuvent utiliser pour produire de nouvelles perceptions, des réflexions et des relations avec le monde organique (ou, comme William Gibson l’écrit : la rue trouve ses propres utilisations pour les choses…). Les Bio-interventionnistes doivent trouver leurs propres usages pour les outils de biologie moléculaire et cellulaire (pour les réaffecter en tant que décolonisation et libération des processus et des objets).

Ayant écarté l’équipement et les modèles de production, nous pouvons commencer à expliquer pourquoi nous croyons tellement en l’amateurisme de ceux qui sont engagés dans le DIY (bidouillage), plutôt que dans les spécialistes, pour montrer la voie de la réorientation des outils et des procédés de la biotechnologie. La raison principale en est que les amateurs n’ont pas de conflit d’intérêts. Leurs intérêts sont personnels et ne s’alignent pas sur ceux des entreprises ou des organisations militaires. Comme indiqué précédemment, la science est une entreprise coûteuse (et nous ne pensons pas ici à l' »entreprise »). L’argent doit venir de quelque part et les trois sources disponibles à cet effet sont : l’armée, le gouvernement et les sociétés commerciales. Cela signifie que les programmes de recherche doivent être en adéquation avec l’une de ces institutions. Pour que chaque investisseur continue à verser de l’argent aux laboratoires, ils doivent d’obtenir quelque chose en retour (que ce soit monétaire ou symbolique). Cela met les scientifiques sous la pression constante d’obtenir des résultats concrets. Le savoir ne suffit pas; il doit découler sur une application tangible (rentable). Malheureusement, la réalité pratique tend à orienter la recherche aux dépens de la connaissance pour son propre profit, bien que certains scientifiques soient devenus habiles à détourner un financement en déguisant leurs recherches par le biais d’un stratagème (une tactique courante pour des chercheurs qui explorent l’espace est de dire que leur travail aboutira à une station lunaire). Les amateurs sont complètement en dehors de cette boucle et peuvent diriger leur attention partout où ils le souhaitent. Le potentiel visionnaire des amateurs est bien plus créatif à l’échelle la vie quotidienne. Ils ne sont pas accablés par l’histoire, les normes, l’examen collégial, la survie institutionnelle et la sociabilisation de la vie en laboratoire. Ils peuvent rassembler et réutiliser sans tenir compte des mécanismes répressifs des disciplines.

Une dimension pédagogique fait également partie de cette alternative à la science du pan-capitalisme. Par le passé, le Critical Art Ensemble a mentionné le problème de l’aliénation. Les Biohackers peuvent aider à démystifier la biologie moléculaire en réalisant des projets qui démontrent que des connaissances de base, concernant l’application et le déploiement de la biotechnologie, sont accessibles et peuvent être facilement acquises par le public. Si nous échouons dans cette initiative, la politique publique de la biotechnologie ne sera pas mise au point par un processus démocratique, mais à travers le processus oligarchique actuel où les sociétés font ce qu’elles veulent en créant leur propre recherche et leurs normes de sécurité et de maintien de l’ordre. Comme toutes les alternatives à la règle du pan-capitalisme, elles doivent venir de la base. De ce fait, il y a beaucoup en jeu à l’heure actuelle. Le BioDIY, le biohacking, le bio-interventionnisme, ou quelque soit le nom que l’on souhaite lui donner, a une charge beaucoup plus grande que l’auto-divertissement par la science amateur, mais occupe une place importante dans le développement d’une biopolitique démocratique, des formes futures de la vie, de la santé et de la diversité de l’écosystème mondial. Le Critical Art Ensemble espère vous voir dans le laboratoire public.

Steve Kurtz
publié dans MCD #68, « La culture du libre », sept. / nov. 2012

Le Critical Art Ensemble (CAE) est un collectif de 5 praticiens des tactiques médiatiques [tactical media], formé en 1987 et dédié à l’exploration des croisements entre art, théorie critique et science. Le groupe a exposé et réalisé des performances dans plusieurs lieux à travers le monde, de la rue au musée et en passant par Internet. Le CAE a également écrit six livres. Dans Molecular Invasion (Autonomedia, 2002) le CAE propose un modèle pour la création d’une biologie contestataire déclinée sous forme d’activisme appliqué au domaine organique. Site: www.critical-art.net/

Le plus beau, c’était le sentiment de puissance que ça me donnait. La technologie travaillait pour moi ; elle me servait et me protégeait. Elle ne m’espionnait pas. Voilà pourquoi j’adore la technologie : utilisée à bon escient, elle peut vous procurer pouvoir et intimité. Cory Doctorow, Little Brother (trad. française, éditions Pocket Jeunesse, 2012).

Hasan Elahi, Tracking Transience. Photo: © Hasan Elahi.

Depuis les attentats du 11 septembre 2001, le fichage des populations occidentales s’est accéléré avec comme argument récurrent de les protéger contre la menace terroriste. C’est dans cet état d’esprit de peur généralisée que depuis cinq ans, les principaux États européens, servis par les technologies de reconnaissance automatisée de l’image faciale, procèdent à un nouveau fichage des images du visage. C’est dire si les notices anthropométriques de Bertillon redeviennent à la mode ! Au final, c’est une triple identification que proposent les démocraties occidentales : empreintes tactiles, empreintes génétiques, empreintes faciales. Ainsi richement dotés, les États possèdent désormais un pouvoir d’identification jamais atteint. Pour les artistes qui s’intéressent à ces choses-là, à l’écriture technocratique et paranoïde des individus ramenés à des fiches chiffrées est opposable une contre-écriture artistique. Influencés par la culture du hack (1), ces derniers utilisent désormais les mêmes moyens. Dans ce contexte particulier, c’est alors pour les artistes soit 0% intimité, soit 100% caché. La dialectique du pouvoir et de l’intimité ne tolère pas le juste milieu.

100% caché
Tout le monde sait que, depuis cinq ou six ans, demander une pièce d’identité en Europe exige que l’on joigne des photos d’identité réalisée selon un certain nombre de critères. Le but est qu’elles soient lisibles par les logiciels de reconnaissance faciale.

Comme contre-écriture à l’écriture étatique du visage, le collectif Ztohoven a réalisé une œuvre étonnante : Citoyen K. (2), un titre en référence à Kafka pour le délire et à Orson Welles pour son objet : pouvoir et identité ! Tout a commencé par un premier « coup » à la Welles justement ! Les Ztohoven piratèrent la météo à la TV qu’ils remplacèrent par une image d’explosion nucléaire. Effets garantis. Pour cela, les Ztohoven furent pistés, traqués et arrêtés une première fois grâce aux fichiers sécurisés de l’État tchèque. En réponse, le collectif a fabriqué par morphing douze photos d’identités fictives, chacune d’elle résultant du mélange des visages de deux personnes bien réelles. La photo ressemblait donc aussi bien à l’un qu’à l’autre visage. Ces photos ont servi à demander des papiers d’identité, lesquels, une fois obtenus sans problème, ont pu être utilisés par deux personnes différentes…

Les Ztohoven ne se gênèrent d’ailleurs pas pour le faire puisque, munis de ces papiers, ils voyagèrent jusqu’en Chine, votèrent aux élections européennes et se marièrent (le vrai marié étant en réalité témoin de son propre mariage !). En 2010, Ztohoven fera de ces douze pièces d’identité une exposition qui vaudra à ses membres une arrestation par la police tchèque et un nouveau procès. La démocratie « Photoshop », retouchant à tour de bras les images des mannequins et des hommes politiques, ne supporte visiblement pas le morphing artistique. L’ironie du sort, c’est qu’avec ce dernier coup pendable à la YesMen, les Ztohoven sont en grande partie sortis de leur cachette.

Hasan Elahi, Tracking Transience. Photo: © Hasan Elahi.

Zéro intimité
L’artiste Hasan Elahi a, quant à lui, préféré ne pas se cacher. Avant le 11 septembre 2001, il était surtout connu des commissaires d’exposition et des critiques d’art. Après les attentats, suite à une dénonciation calomnieuse, il obtient d’être connu des services de renseignement américains.

Arrestation et inscription sur la liste des présumés terroristes en prime. Il est alors surveillé en permanence. Pas facile de déjouer la NSA ou la CIA. Après tout, s’ils veulent savoir, offrons-leur tout ce qu’ils veulent et même plus encore, telle est l’idée du projet Tracking Transience (3). Tout, absolument tout, des lieux où ils se trouvent (indiqués grâce à un plan et une position géolocalisée sur son site), de ce qu’il mange, des toilettes où il se rend, ils sauront tout de la vie d’Hasan Elahi. De quoi satisfaire la volonté de savoir du gouvernement américain. Ainsi Hasan Elahi se raconte et se contre-écrit.

Car aujourd’hui nous nous racontons avec nos ordinateurs. Dès lors, ou bien nous les laissons nous raconter, ou bien nous nous en emparons en pleine conscience. De 2000 à 2003, à l’occasion d’une commande par le Walker Art Institute, le collectif 0100101110101101.ORG (Eva et Franco Mattes) livrait au public le contenu entier de leur ordinateur (jusqu’aux mails). Le projet s’appelait Life Sharing. Dans un second projet, en 2002, intitulé Vopos (4) par référence au nom de la police de RDA, les deux mêmes artistes communiquaient aux internautes leur position géographique quotidienne grâce à un dispositif GPS. Pour le caractériser, ils qualifièrent le projet de système d’auto-surveillance pour une transparence numérique complète. Un projet prophétique !

Charlotte Norton-Noudelman & Emmanuel Guez
publié dans MCD #66, « Machines d’écritures », mars / mai 2012

Hasan Elahi, Tracking Transience. Photo: © Hasan Elahi.

(1) En 2008, en plein débat sur le fichage biométrique, le CCC (Chaos Computer Club) a publié les empreintes digitales de Wolfgang Schäuble, alors ministre de l’Intérieur en Allemagne. La méthode utilisée avait été publiée par le CCCBerlin quatre ans auparavant : ftp://ftp.ccc.de/documentation/Fingerabdruck_Hack/fingerabdruck.mpg

(2) > www.ztohoven.com/obcan.html

(3) > http://trackingtransience.net/

(4) http://0100101110101101.org/home/vopos/index.html