La question de la conservation et la sauvegarde des œuvres numériques est désormais mieux prise en compte par les fondations, galeries et musées. Esprits de Paris, l’installation sonore de Mike Kelley (plasticien disparu en 2012) et Scanner (Robin Rimbaud), vient ainsi de faire l’objet d’une importante restauration menée par le Centre Pompidou.
Initialement produite et présentée en 2002 pour l’exposition Sonic Process : une nouvelle géographie des sons, cette installation mêle surveillance vidéo, déambulation urbaine, images captées à la caméra thermique dans des night-clubs, à une mystérieuse composition électronique traversée de pics, de ressacs et de stases où s’expriment les « fantômes » qui hantent la technologie elle-même.
Entre field recordings, electronic noise et captations dans des lieux parisiens chargés d’histoire, ce dispositif singulier se distribue sur douze écrans enchâssés dans une structure en bois construite sur-mesure et rend aussi hommage aux pionniers des EVP (Electronic Voice Phenomena) ; à commencer par Konstantin Raudive. L’installation sera visible et audible jusqu’à la fermeture du Centre Pompidou, en mars 2025, pour des travaux de rénovation qui vont durer jusqu’en 2030.
> Mike Kelley & Scanner (Robin Rimbaud), Esprits de Paris, installation sonore
> du 03 décembre au 15 mars, Centre Pompidou (niveau 4, salle 22), Paris
> https://www.centrepompidou.fr/
https://dev.digitalmcd.com/wp-content/uploads/2024/12/MikeKelleyScanner_EspritParis.jpg620600Laurent Dioufhttps://dev.digitalmcd.com/wp-content/uploads/2025/11/logo-mcd-noir.svgLaurent Diouf2024-12-06 06:03:302024-12-06 06:03:30Esprits de Paris
Malgré la généralisation du sans-fil, le câblage est encore très présent pour alimenter, recharger ou connecter les nombreux appareils que nous utilisons au quotidien. Avec les câbles audio, les fils électriques sont les plus répandus. C’est ce type de câbles qu’utilise Cécile Babiole dans une série d’œuvres présentées à l’issue d’une résidence au LABgamerz dans l’exposition Loops of the Loom, à Aix-en-Provence au Musée des tapisseries jusqu’en janvier prochain.
L’intitulé et le lieu trahissent l’intention de Cécile Babiole : se servir de câbles électriques de différentes couleurs pour faire du tissage. L’entrecroisement de ces fils se répète de manière algorithmique pour former un motif selon un « pattern » préétabli ». Couplés à des cartes-sons, des amplificateurs et des haut-parleurs, les câbles transmettent des signaux audio, des boucles (loops) basées sur les motifs de chacun de ces tissages.
Cécile Babiole se sert de ces dessins et entrelacements de couleurs comme d’une partition de séquences rythmiques, dont chaque point (croisement d’un fil de chaîne et d’un fil de trame) forme une unité temporelle de base, comme le pas d’un séquenceur. La suite spatiale des motifs visuels devient l’enchaînement temporel des motifs sonores. Les séquences rythmiques sont entièrement réalisées à partir d’échantillons de sa voix… Il n’est pas anodin de rappeler que les métiers à tisser de type Jacquard, apparus au début du XVIIIe siècle, sont les premières machines programmées avec des cartes perforées, tout comme les pianos mécaniques et certains automates.
En parallèle, Cécile Babiole a conçu Radio TXT : une installation radio avec une antenne tissée. Diffusé dans la salle d’exposition, ce dispositif retransmet un programme spécial d’une dizaine de minutes sur la bande FM via un petit émetteur. On y entend de courts récits et anecdotes sur différents thèmes en rapport avec le textile comme le langage, le genre, l’informatique, l’histoire de l’art et la typographie.
On découvre aussi la vidéo d’une performance : Tisser la terrain de football. Pourquoi « la » terrain ? Parce que Cécile Babiole fait acte d’appropriation symbolique d’un espace public très majoritairement fréquenté par des utilisateurs masculins. Munie d’un capteur GPS, elle a arpenté un terrain de football en long et en large afin de dessiner virtuellement des lignes figurant la chaîne et la trame d’un textile imaginaire à la taille du terrain. Le tracé de ses déambulations est affiché en vidéo sur un fond de carte issu du projet de cartographie collaborative OpenStreetMap.
Active dès les années 80, Cécile Babiole est une artiste qui a abordé musique électronique, performance, animation 3D, installation, vidéo, art numérique. Ses travaux récents s’intéressent à la langue (écrite et orale), à sa transmission, ses dysfonctionnements, sa lecture, sa traduction, ses manipulations algorithmiques. Avec Anne Laforet, elle est également co-fondatrice du collectif Roberte la Rousse, groupe cyberféministe qui travaille sur la thématique « langue, genre et technologie » sous la forme de performances et de publications. Cécile Babiole est par ailleurs membre du collectif d’artistes-commissaires Le sans titre et, également, commissaire d’exposition indépendante.
Articulée autour de nos sens que sont la vue et l’ouïe, l’exposition Dans la nature… chemine entre montagnes, mers et forêts, glaciers et îles, à la découverte d’un environnement de plus en plus fragilisé lorsqu’il n’est pas menacé… En utilisant différentes technologies, high tech ou bricolées, les artistes nous invitent à une rencontre singulière avec la nature dans ce qu’elle a d’invisible, d’inaudible, de caché et parfois de fantasmé… Rémy Bendernous propose de découvrir le site du Grand Cor (2584 m d’altitude) en Suisse avec un film produit par une caméra éolienne, et se laisser transporter par le sifflement du vent… Felix Blume nous immerge dans une pièce qui bourdonne du son des vols de 250 abeilles diffusés par autant de petits haut-parleurs… Stéphanie Roland nous montre des îles dont la cartographie vidéo révèle la date future d’engloutissement. Sébastien Robert nous donne non pas à voir, mais à entendre les aurores boréales perturbées par les ondes de notre ultra-communication… Pali Meursault & Thomas Tilly nous invitent à écouter le son des glaciers et des témoignages sur les effets du réchauffement climatique sur le milieu de la haute-montagne. Anne Zimmermann surprend et nous surprend avec les captures vidéos d’animaux qui rôdent la nuit dans la forêt. Silvi Simon joue les magiciens en fixant sur image l’apparition évanescente de végétaux.
Dédié aux arts visuels, sonores et numériques, le festival ]interstice[ propose, sur 12 sites, pas moins de 24 artistes de 8 nationalités, 17 exposants, 7 concerts et performances, une programmation OFF imaginée par le collectif Manœuvre et un colloque international dans le cadre du Millénaire de Caen 2025. Cette 18e édition s’articule autour du thème des paysages contre nature.
Le concept de « paysage » ne cesse de se redéfinir. Le festival souhaite ré-interroger les rapports complexes qu’entretiennent nature, paysage et technique. Il s’agit de questionner les « nouveaux » paysages ou les paysages hybrides que les œuvres numériques proposent.
Comment les artistes figurent ou défigurent-ils/elles le paysage ? Comment le font-ils/elles éprouver ? Avec quels dispositifs et selon quels procédés techniques ? Et surtout quelle est la nature des paysages qu’ils/elles travaillent ?
Paysages virtuels, fabriqués, inconscients, rêvés ; paysages du jeu, de la fiction, de la catastrophe ; paysages microscopiques, contemplatifs, synthétiques, machiniques, fantomatiques… Autant d’approches et d’interprétations proposées pour tenter de se forger un autre regard paysager, ou expérimenter une autre sensation paysagère.
avec Manœuvre, Thomas Andrea Barbey, Vincent Leroy, Paul Duncombe, Thibault Brunet, Diane Morin & Ana Rewakowicz, Joanie Lemercier, Ulrich Vogl, Thomas Garnier, Justine Emard, Thomas Pausz, Rajat Mondal, Linda Sanchez, Pierce Warnecke & Clément Édouard, Claire Chatelet, Heleen Blanken, KL&D, Céleste Gatier, VAKRM, Alex Smoke, Moritz Simon Geist, Exiit & Shaamu, Datum Cut, Thomas Laigle, Rekick, Outrenoir, Joanna OJ…
Multitude et singularité : ces deux notions ne s’opposent pas, mais se complètent pour dessiner notre futur immédiat. La multitude c’est bien sûr celle des réseaux et des données, celle aussi de la manière de représenter et d’appréhender le monde au fil des innovations numériques (virtualité, etc.). La Singularité (avec une majuscule) c’est l’étape suivante, celle où la technologie s’émancipe et surpasse son créateur. Vernor Vinge, mathématicien et auteur de science-fiction, en a rappelé la possibilité au début des années 90s. Un point de bascule qui commence actuellement à s’imposer à l’humanité comme questionnement majeur avec les balbutiements de l’Intelligence Artificielle.
Stine Deja & Marie Munk, Synthetic Seduction: Foreigner. Photo: D.R.
Multitude et singularité : pour l’art à l’ère digital c’est une double source d’inspiration. L’exposition collective éponyme nous en offre un aperçu au travers d’une toute petite dizaine d’œuvres visibles à Paris, à la Maison du Danemark, jusqu’au 25 février. L’emblème de cet événement est l’étrange visage d’une créature synthétique s’observant dans un miroir. Cette installation fait partie de la série Synthetic Seduction de Stine Deja et Marie Munk. Une œuvre collaborative qui « déborde » dans le réel et le virtuel, comme sculpture et installation vidéo. L’humanoïde que l’on voit découvrir son visage et surtout les formes arrondies qui s’empilent sur écran trouvent un prolongement sous forme de grosses excroissances de couleur chair (précision : une chair bien rose d’Occidental marbrée de veines bleues…). Disposées sur le sol de l’espace d’exposition, ces sculptures organiques ne sont pas sans évoquer les poufs des années 70s ; une photo montre d’ailleurs les deux artistes vautrés (lovés ?) dans cette création au penchant « régressif ».
Cecilie Waagner Falkenstrøm, An algorithmic gaze II. Photo : D.R.
La chair est également au centre de l’installation générative de Cecilie Waagner Falkenstrøm. An algorithmic gaze II montre une succession d’images fondues et enchaînées d’hommes ou de femmes qui se déploient selon une chorégraphie au ralentie. Mais ici la « couleur chair » offre une palette plus large, comme affranchie des stéréotypes si souvent reconduits par les algorithmes. La superposition de ces corps hybrides, déformés comme s’ils étaient en cire ou échappés d’un tableau de Dali, témoigne des efforts de la machine pour surmonter ce biais algorithmique en rassemblant des milliers de photographies de nus qui soient à la mesure de nos diversités en termes de genre, d’âge et d’ethnicité.
Mogens Jacobsen, No us (1 off). Photo : D.R.
La multiplicité et la mixité sont aussi à l’image des visiteurs grâce à No us (1 off) de Mogens Jacobsen. Située à l’entrée de l’exposition, cette installation générative invite le spectateur à se regarder dans un miroir semi-transparent qui « cache » une caméra couplée à un système de détection faciale. Ce qui ressemble à une platine disque, « reconfigurée » comme interface de projection, permet d’afficher le visage du visiteur puis de le fusionner avec d’autres visages sur un écran avec une résolution correspondant à celle des débuts de la télévision cathodique. Image de soi encore avec 360° Illusion IV de Jeppe Hein. Ce dispositif plus mécanique que numérique, low-tech donc, repose sur un jeu de miroirs rotatifs. Ce qui surprend c’est le mouvement de l’image qui tourne, comme scotchée sur les miroirs, alors que l’on s’attend à ce que notre reflet reste immobile malgré la rotation du dispositif…
Jens Settergen, GhostBlind Loading. Photo : D.R.
L’installation sonore de Jens Settergen, GhostBlind Loading, comporte également des miroirs ainsi que des pierres et des feuilles (mais pas de ciseaux). Ce décor est la mise en scène d’un dispositif nous permettant d’écouter l’invisible, c’est-à-dire les sons et activités électromagnétiques des appareils électroménagers « intelligents » et autres objets connectés qui ont envahi notre quotidien. C’est un autre élément qui est au centre de l’installation vidéo de Jakob Kudsk Steensen : l’eau. Indispensable à la vie, composante majoritaire de notre masse corporelle, mais aussi à l’origine pour certaines personnes de peur irrationnelle : Aquaphobia est une suite de paysages virtuels fantasmagoriques, de couleur verte bleutée, comme échappés de jeux vidéos ou d’un film d’anticipation
Laurent Diouf
> Multitude & Singularité avec Stine Déjà & Marie Munk, Jeppe Hein, Mogens Jacobsen, Jakob Kudsk Steensen, Jens Settergren, Cecilie Waagner Falkenstrøm…
> cette exposition s’inscrit dans le cadre de Nemo – Biennale internationale des arts numériques
> commissaire d’exposition : Dominique Moulon
> du 8 décembre au 25 février, Le Bicolore / Maison du Danemark, Paris
> https://lebicolore.dk/
À mi-chemin entre robotique low-tech et sculpture sonore, le collectif Tout reste à faire (Mathieu Desailly, Vincent Gadras, David Chalmin) propose un étrange bestiaire. Des insectes géants composés à partir d’éléments de vieux instruments de musique (accordéon, harmonium, clavecin, ukulélé…) qui sont recyclés et réagencés. anima(ex)musica réunit une dizaine de créatures : sauterelle, méloé, scolopendre, cigale, doryphore, cloporte, punaise, scarabée…
Ces créatures mécaniques, qui présentent un aspect steampunk avéré, sont rendues mobiles et animées. Leurs mouvements imitent la discrétion des insectes et se présentent sous forme de micro-déplacements, de vibrations, d’ondulations… Chacune fait l’objet d’une composition musicale dont l’orchestration renvoie aux instruments ayant servi à sa fabrication. Chaque spécimen est doté d’une partition. Leur chant est déclenché par l’intrusion des spectateurs dans son espace et contribue à l’inquiétante étrangeté de la rencontre.
Alors que leur modèle dans la nature sont minuscules, ces reproductions mécaniques surprennent aussi par leurs dimensions. Citant Darwin, le collectif insiste sur ce point : s’il était possible d’imaginer un mâle Chalcosoma avec son armure de bronze poli et ses encornures complexes qui aurait la taille d’un cheval ou simplement celle d’un chien, il deviendrait l’un des animaux les plus impressionnants de la planète.
Cela fait maintenant près de dix ans que ce projet a été initié. Le bestiaire s’est agrandit progressivement. Il est présenté aux Champs Libres à Rennes selon une scénographie qui évoque les alvéoles d’une ruche. Cela permet de présenter trois points de vue différents de l’exposition à savoir : une vision dite souterraine, une vision au sol et une vision aérienne, reproduisant ainsi les trois niveaux possibles des biotopes propres aux insectes. Dernier né, un grillon sera finalisé durant le temps de cet événement, au cours de 3 séances d’atelier. Visible gratuitement jusqu’au 3 septembre, anima(ex)musica sera ensuite présentée à la Cité de la Musique – Philharmonie à Paris jusqu’au début de l’année prochaine.
Visualiser le son est une exposition collective (sons, vidéos, art génératif, installations interactives, projections, rencontres) qui présente différentes approches quant à ces connexions, et cela à travers différentes perspectives : les partitions graphiques de Chiyoko Szlavnics et Clara de Asís ouvrent la porte vers une conception plus ample et visuelle de l’écriture musicale.
Les vidéos de Simon Girard et Julien Haguenauer, ainsi que les données sonifiées et mises en vidéo par le duo britannique Semiconductor, nous montrent comment les images et les sons peuvent être traités et générés d’une même manière. Les images fixes de Sigolène Valax et Sabina Covarrubias proposent des musiques dont la sonorité est perçue en tant que couleur et forme, tandis que l’art génératif de Guillaume Loizillon révèle le champ des possibles de l’univers du web.
Enfin, l’interactivité et la gestuelle sont mis en évidence dans les travaux de Basile Chassaing et la pièce que [Federico Rodriguez-Jiménez] propose : les capteurs de mouvement ou de son permettant au spectateur de voir le sonore en tant que geste ou en tant qu’image en temps réel. Visualiser le son ouvre une réflexion autour des possibles zones de brouillage entre le son et l’image.
En répondant à l’écriture traditionnelle du phénomène sonore, cette exposition enquête sur l’écriture musicale elle-même et pointe vers de nouvelles directions concernant la notation des mondes sonores contemporains. […] Et s’il est question, dans l’exposition Visualiser le son, de données qui génèrent indifféremment des sons ou des images, d’outils technologiques qui réinventent l’écriture musicale, la programmation cinéma qui l’accompagne dresse quant à elle un panorama des relations entre « audio » et « visuel »…
https://dev.digitalmcd.com/wp-content/uploads/2025/11/logo-mcd-noir.svg00Laurent Dioufhttps://dev.digitalmcd.com/wp-content/uploads/2025/11/logo-mcd-noir.svgLaurent Diouf2023-03-12 01:16:572023-03-12 01:16:57Visualiser le son
Il reste encore quelques jours pour parcourir l’exposition consacrée à Christian Marclay au Centre Pompidou à Paris. Connu pour ses performances en tant que platiniste (en anglais, turntabilist), il est également reconnu pour ses nombreux « détournements » de disques et samplings vidéo.
Parmi les pièces exposées figurent des vinyles lacérés, balafrés avec des pastilles et du scotch, rayés ou collés en morceaux… Des disques « préparés » pour ses performances justement. C’est principalement sur, avec et autour de ce support musical que Christian Marclay déploie sa pratique artistique liée au son, au bruit, à la musique et à l’image…
Dans cette exposition, on découvre de nombreux détournements, collages, montages. À commencer par les patchworks de pochettes de disque qui composent des instruments étirés (Guitar neck) ou des personnages au corps composite, si ce n’est transgenre (la série Body mix). À ces cadavres exquis s’ajoutent aussi d’autres juxtapositions de pochettes présentant le même motif (pin-up des années 50, chefs d’orchestre exaltés, bouches qui forment une étrange rosace)…
Jouant la répétition d’une même pochette, celle de My Fair Lady (Rex Harrison & Julie Andrew) et des disques qu’elles renferment, Christian Marclay a construit deux gigantesques silhouettes qui ressemblent à des marionnettes (Galatea and Pygmalion). Il a aussi créé de fausses pochettes de disques plus vraies que nature (Imaginary Records).
Selon le principe de l’accumulation, Christian Marclay a aussi érigé des disques en une colonne sans fin qui évoque Brancusi (Endless Column). Beaucoup de ses pièces font d’ailleurs référence, de manière implicite ou explicite, à des monstres de l’art contemporain — comme sa guitare molle qui renvoie à Dali (Prosthesis) — mais aussi au mouvement Fluxus et au Punk.
Pour autant, le vinyle n’est pas le seul support que Christian Marclay soumet à son imagination. Il s’est aussi amusé à tisser une sorte de hamac géant symbolisant les mailles du réseau (Net) avec des bandes magnétiques, ainsi qu’une sorte de coussin, The Beatles, qui comme son nom l’indique est « composé » avec l’intégralité des enregistrements du groupe.
Il bricole également une roue de chariot avec des CDs fondus (Wheel) et forme un cercle avec des K7 audio (Untitled : cassette circle). Il réalise également des œuvres « entremêlées » en déroulant et mélangeant, cette fois au figuré, des bandes de cassettes (Memento, Mashup : diptych with two cassettes, Allover).
Au-delà de la musique et de la diversité de ses supports, c’est plus généralement le son et l’image du son que Christian Marclay s’amuse mettre en valeur. En premier lieu les onomatopées significatives de la BD (Blamm, Schhhh, Swooosh, Whomp, Aaaaah, Poom…) qu’il rassemble, découpe et ré-assemble pour composer des suites, des tableaux ou des portraits dignes du Comic Strip de Gainsbourg. Christian Marclay traque également les marques d’objets, étiquettes de boisson, annonces et enseignes de magasins qui font également appel à des onomatopées (Zoom, Zoom).
De l’image statique à l’image animée : Christian Marclay poursuit son travail sur vidéo, toujours selon le principe de répétition, juxtaposition et variation. Son œuvre emblématique, The Clock, qui séquençait des milliers de scènes de film où l’heure est indiquée, formant un « cadran cinématographique » de 24 heures projeté en indiquant le temps réel lors de sa diffusion n’est pas présentée ici.
Mais on peut revoir Téléphones, une vidéo pré-portable qui date de 1995 et compile des extraits de films avec bruits de cadrans, compositions de numéro, sonneries intempestives, allôôôô stressés et raccrochages frénétiques… Autre bijou dans le même style : Doors. Un exercice de sampling vidéo virtuose, inédit et spécialement réalisé pour cette exposition. Un travail de marqueterie qui enchaîne dans une continuité saisissante les ouvertures et fermetures de portes en démultipliant les personnages qui apparaissent à l’écran comme dans un ballet.
La Muse en Circuit a été créée en 1982 par Luc Ferrari. À l’époque, cette structure est basée à Vannes. Dix ans plus tard, déménagement à Alfortville et construction de nouveaux studios (électroacoustiques et radiophoniques). En 1994, Luc Ferrari démissionne et David Jisse lui succède. Depuis 2013, c’est Wilfried Wendling qui dirige ce Centre National de Création Musicale.
Pour ses quarante ans d’existence, La Muse en Circuit rend hommage à son fondateur. En particulier grâce à l’ensemble Soundinitiative qui proposera un parcours décalé et humoristique reprenant des pièces performatives de Luc Ferrari (…) peu jouées et inviteront le public à des jeux d’interactions sociales intuitives, avec cette légèreté profonde, typique du compositeur.
En avant-première, Jérôme Florenville présentera Une autre écoute est possible. Un documentaire qui part sur les traces de ce que fut La Muse en Circuit, véritable laboratoire sonore qui irrigue jusqu’à aujourd’hui tout un courant de musiques inclassables dont le fil rouge s’articule autour de la création sonore : expérimentales, contemporaines, électroacoustiques, improvisées, bruitistes, etc.
La galerie d’exposition Le 148 à Alfortville, offre une exposition sonore pour entrer dans l’univers de La Muse en Circuit au travers de deux espaces. L’un dédié à une installation sonore immersive Le Cycle des souvenirs, création de Luc Ferrari. Au centre de plusieurs enceintes placées à différentes hauteurs, le spectateur est plongé dans un espace sonore nourri des souvenirs du compositeur. (…) Tous les éléments sont architecturés en cycles qui, en se superposant, produisent des rencontres hasardeuses. (…) La boucle sonore se décale et se transforme à l’image des transformations et déformations opérées par la mémoire et le temps… L’autre espace est dédié à un atelier de création sonore avec des objets électroniques ludiques (Soundbox) et des logiciels dédiés (Motionkit).
Une expérience immersive et multisensorielle proposée par Molécule, musicien transdubalistique et chasseur de son, combinée avec les créations visuelles de Dirty Monitor. Un voyage à vivre sous le dôme de la SAT (Société des Arts Technologiques à Montréal) ou « résonnent » les craquements des glaciers, le souffle de la banquise et le silence de la nuit polaire captés par Molécule lors d’une expédition au Groenland, dans un village inuit. Immergé à 360°, pour le son, comme pour les visuels, cette odyssée sensorielle téléporte les auditeurs dans le Grand Nord une quarantaine de minutes.
> du 8 au 26 février, séances à 17h00, 18h30 et 20h00, Société des Arts Technologiques (SAT), Montréal (Québec / Canada)
> https://sat.qc.ca/