Digital / Alter

Après des préliminaires à Marseille, via une exposition monographique de Paul Destieu en septembre, le Festival des arts multimédia Gamerz va prendre son envol le 13 novembre à Aix-en-Provence. Au programme des expositions, performances, ateliers et conférences qui s’étalent sur une dizaine de jours.

PAMAL_Group (feat. Jacques-Elie Chabert et Camille Philibert), 3615 Love. Photo : D.R.

À la suite de « Digital Defiance » et « Digital Animisme », cette quinzième édition est structurée autour de « Digital Alter » : l’exposition centrale à la Fondation Vasarely qui propose des ensembles monographiques questionnant, comme son titre l’indique, l’altérité à l’ère du digital. Comme il est précisé dans la déclaration d’intention, les artistes présentés se tournent vers « l’Autre » afin de dépasser l’individualisme, l’autoreprésentation et le narcissisme valorisés par les technologies numériques et les modèles de la communication « télématique » ou actuelle.

Une proposition pouvant aussi se résumer à cette interrogation : et si l’enjeu technologique n’était pas tant celui de la connaissance et du pouvoir, mais avant tout celui du désir et du rapport à l’autre ? Dans ce jeu de miroir brisé par les nouvelles technologies, la figure de l’androïde reflète peut-être le mieux ce rapport trouble à l’autre. En présentant diverses versions d’avatars mécanisés ou bio-modifiés, du cyborg aux nouveaux animaux de compagnie électronique en passant par des représentations de clonage, France Cadet nous apporte une réponse dystopique.

Fabrice Métais — qui s’intéresse notamment aux propriétés constituantes ou intrigantes des technologies audio mobiles — opte pour une approche presque métaphysique de ce rapport à l’autre. Son regard est à déchiffrer sous forme d’énigme dans ses créations (L’Intrigue). Il entamera aussi un dialogue avec le philosophe Jean-Michel Salankis lors d’une conférence (Art, technique, matière et idée).

Olivier Morvan qui nous avait justement intrigués lors de l’édition 2016 de Gamerz avec La Maison Tentaculaire — projet et installation protéiforme autour de la fameuse maison de l’héritière Sarah Winchester — nous entraînera dans son univers parallèle composé d’une multitude de petites usines à fictions qui jouent sur paradoxalement sur l’absence (Meme).

Dans une démarche d’archéologie des médias, le collectif PAMAL_group (issu du Preservation & Art – Media Archaeology Lab de l’École Supérieure d’Art d’Avignon) nous invite à un voyage rétrofuturiste autour du Minitel dont le réseau s’est définitivement éteint en juin 2012 (3615 Love). Des œuvres de Julius von Bismarck, Jon Rafman et Antonio Roberts complètent ce panorama de l’altérité digitale.

Manuel Braun & Antonin Fourneau, Egregor. Photo: D.R.

D’autres œuvres jalonnent cette édition, notamment à l’Office de tourisme avec les dispositifs ludiques de Manu Braun & Antonin Fourneau (Egregor 8) ainsi que Robin Moretti en collaboration avec Leslie Astier et Théo Goedert que l’on retrouvera aussi dans le cadre d’un workshop (Métalepse, La Chair du jeu-vidéo).

Enfin, concernant les performances, le programme se partage essentiellement entre art sonore et musiques expérimentales, bruitistes, électroniques et post-industrielles… En premier lieu, nous sommes curieux du Feedback acoustique de Virgile Abela. Un dispositif qui repose sur un pendule type Foucault dont la lente oscillation ponctuée de quelques rotations génère une modulation traduisant les effets de la gravité. Cette installation a été conçue en coordination avec la plateforme MAS (Laboratoire de mécanique acoustique du CNRS).

En tête-à-tête avec Stéphane Cousot, eRikM entamera une improvisation à partir de flux sonores et visuels récupérés en temps réel sur Internet. Il en résultera une « composition indéterminée », assez heurtée et cinglante (Zome). Inspirés par Deleuze, François Parra & Fabrice Cesario (alias PACE) pousseront dans leurs retranchements des machines habituellement dédiées à la communication pour produire un langage dans lequel ils abandonnent temporairement le sens pour entrer dans le son (Le Chant des machines).

Enfin, le collectif chdh (Nicolas Montgermont & Cyrille Henry) se basera sur les « bruits » de l’image vidéo pour une performance AV conçue comme une expérience synesthésique. À l’écran, un magma de pixels — qui n’est pas sans rappeler la neige des écrans cathodiques — d’où émergent des formes, des motifs, des structures aléatoires, sur fond d’electronic-noise très abrasive (Deciban).

Laurent Diouf

Festival Gamerz — Digital / Alter
> du 13 au 24 novembre, Aix-en-Provence
> http://www.festival-gamerz.com/

Le Centre Des Arts d’Enghien-les-Bains accueille la première édition des Rencontres ArTeC initiées par l’École Universitaire de Recherche ArTec affiliée à l’UPL (Université Paris Lumières). Comme son nom l’indique, cet événement propose des conférences, projections, expositions et performances à la confluence de l’art et des technologies du numérique. Le programme étalé sur deux jours, les 5 et 6 novembre, est dense.

Nombre d’interventions, sous forme de conférence ou de performance, présentent des projets et études encore à l’œuvre. Parmi ces nombreux works in progress qui seront mis en avant, il sera question notamment de La transformation de l’enseignement en art, de La fluidité du photographique, des rêves filmés par la Société psychanalytique amateur (Dreams Films, The Amateur Coney Island Psychoanalitic Society), des Temps profonds du cinéma expérimental, de virtualité et de création (Research presence, haptic creativity and virtual togetherness ; VR auditory space)…

> 05 et 06 novembre, Centre des Arts, Enghien
> http://eur-artec.fr/2019/

Fabrication Solidaire en Lab, 8 séances d’initiation à la cultures maker et aux pratiques premières de la fabrication numérique, en immersion dans des fablabs !

Formation Arduino chez Simplon Lab

Dans un contexte de démultiplication des tiers-lieux et de transformation des métiers liés à la fabrication, Fab Sol Lab est un projet expérimental qui vise à favoriser l’insertion sociale et professionnelle de personnes éloignées de l’emploi, bénéficiaires du RSA et/ou suivies par Emmaüs Solidarité.

Cette formation de 32H, qualifiante, propose de découvrir 3 fablabs parisiens ainsi que les outils, technologies et usages qui leur sont propres. Au-delà des compétences techniques, MCD souhaites initier des rencontres autour d’un écosystème bienveillant et innovant, donnant l’occasion aux participants de gagner en confiance grâce à une pédagogie « Learning by doing » . En appui sur le référentiel conçu avec l’IMT et Makery.info ( « S’initier à la Fabrication Numérique »), Fab Sol Lab se complète de temps dédiés aux softskills et l’expression orale.

La formation met en avant » l’up-cycling » et le « DIY », permettant aux participants de valoriser les savoir-faire, d’actualiser des compétences techniques et créatives et de repenser, ensemble, des modes de production et de consommation alternatifs. Dans le cadre du parcours, les apprenants ont d’ailleurs été invités à visiter Re-Store de Woma, un lieu dédié au réemploie à la revalorisation des matériaux.

 

Cette action est produite par MCD, avec le soutien financier de la Fondation de France, en partenariat avec Simplon.co, le Carrefour Numérique,  Woma, fabrique de quartier, Emmaüs Solidarité et la FACE.

 

 

 

 

 

Machina est un projet de recherche-création collective et intergénérationnel. Créer et animé par l’artiste Cristina Hoffmann, cette action est une co-production MCD et Centre d’arts d’Enghien-Les-Bain. Cette nouvelle action, qui prend appui sur l’expériences de l’action HyperLadies, invite des publics à explorer les réflexions liées à l’apparition d’internet, le développement du numérique, ainsi que l’arrivée imminente de la robotique et de l’intelligence artificielle. 

Lors de séances de travail collectif, les participants ont l’occasion d’adopter l’état d’esprit d’un artiste à son atelier. L’objectif est de regarder, lire, questionner, écrire, dessiner, filmer, bricoler, collaborer, s’enrichir, s’exprimer, et aboutir à une production qui sera partagée avec tous en fin de saison. 

Par le biais de leurs recherches, de leurs créations et de leurs actions collectives, l’artiste et les participants nous montrent que le numérique est accessible à tous et que nous sommes libres de remettre en question nos techniques et la façon dont nous cohabitons avec elles.

Cette première saison de Machina réunira 5 à 6 temps forts permettant la rencontre, la découverte et l’interprétation des cultures et de la création numérique et contemporaine.

L’ action Machina, proposée aux publics de MCD, est financée par la Mairie de Paris ainsi que par la Mairie du 10° arrondissement de Paris. L’édition 2019-2020 a démarré lors du parcours MCD, Media Arts For Good.

Vous êtes une structure sociale ou culturelle désireuse de proposer cette action à vos publics,  vous êtes un artiste et vous souhaitez élaborer un atelier de création numérique permettant d’aborder des pratiques innovantes sous un angle ludique, décalé et créatif –> Contactez nous!

En 3 mois et demi, la formation MIIT3 accompagne chaque participant·e dans l’acquisition de savoir-faire techniques et de compétences transversales, permettant d’adresser des métiers en tension dans le domaine des réseaux et de la sécurité informatique.

La formation s’articule autour de l’acquisition de 3 certifications devenues incontournables sur le marché :

  • CCNA-Cisco Certified Network Associate – Routing & Switching : base essentielle pour s’orienter vers le secteur informatique ;
  • ITIL Foundation : référentiel phare dans la gestion des services IT ;
  • Pipplet FLEX : reconnaissance officielle du niveau d’anglais professionnel.

L’accès à cette formation est gratuit et réservé aux demandeu·r·se·s d’emploi résidants franciliens.  La présentation aux examens des certifications ciblées est également prise en charge.

Depuis 2018, MCD et Learneo ont conduit 6 sessions de formations et former près de 100 personnes, de 19 à 56 ans, avec un taux moyen 68% de sorties positives à 6 mois post-formation.  Aujourd’hui, nos enquêtes permettent de recenser 24 CDI, 17 CDD, 10 poursuites de formation, 3 créations d’entreprise et 70% de CCNA – CISCO obtenus au premier passage. Afin de favoriser ces retours à l’emploi, MCD et Learneo déploient des partenariats pour proposer des briques complémentaires au parcours initial MIIT3.

La formation est accessible sans près-requis de diplôme ou de compétence technique, son recrutement s’appuie avant tout sur la motivation des candidats et leur capacité à se projeter dans un projet post formation. 

La formation se déroule dans le 18e arrondissement de Paris, à Learneo, centre de formation agréé « Cisco Learning Partner » disposant d’un Lab technique et de son propre centre d’examen Pearson-VUE.

Cette formation est financée par le département Seine-Saint-Denis, la Mairie de Paris et Est Ensemble dans le cadre des appels à projets ParisCode (2,3,4 et 5 ) et ParisCode Est Ensemble, le département Seine Saint-Denis, l’Europe dans le cadre d’un FSE, Pôle Emploi et la fondation HSBC pour l’éducation.

MIIT3 est produite par MCD, Art2M, Learneo .

Pour plus d’information contactez-nous à l’adresse suivante : candidature@digitalmcd.com.

quel corps pour le futur ?

Comme d’autres formes d’expression, la danse contemporaine a rejoint depuis longtemps l’art numérique. Le projet transdisciplinaire Eve 2050 initié par la compagnie Corps Secrets d’Isabelle van Grimde transcende cette synergie avec les nouvelles technologies. Cette création implique les spectateurs grâce à des dispositifs interactifs permettant de capturer le mouvement, transformer des textures et éléments de décor, moduler le son et manipuler des images en temps réel. Décliné à l’origine en vidéo (une web-série en 5 épisodes) et prenant également la forme d’une installation, le spectacle Eve 2050 est une invitation à réfléchir sur la condition humaine et son « à venir » en mettant en jeu, en scène, des corps réels, augmentés, modifiés et/ou virtuels dans une ambiance de futur proche, très proche… Entretien avec Isabelle van Grimde.

Est-ce que l’idée d’une trilogie, d’un triptyque, s’est décidée dès le départ ou est-ce que cela s’est imposé au fil du développement du projet ?
Le projet était au départ un feuilleton web… Mais très rapidement nous avons exploré la possibilité d’une installation et en même temps d’une œuvre pour la scène.

Est-ce que vous pouvez résumer la trame narrative de cette mini-série — les pérégrinations et transformations que subit Eve 2050 ?
Il n’y a pas à proprement parler de trame narrative, en danse on est plus proche de la poésie… Mais la websérie par son esthétique cinématographique et l’apport du réalisateur Robert Desroches touche par moments à une forme de narration… Tous les interprètes qu’ils soient féminins, masculins, de tous âges et origines sont Eve ; donc l’histoire est multiple… Dans ORIGIN on aborde les nouveaux rituels de naissance, de mort et de reproduction, dans TRANSFORM on aborde la fusion avec la machine, dans HYBRID on aborde l’idée d’augmentation par hybridation avec d’autres espèces vivantes, végétales, animales ou bactériennes (en ce sens nous sommes déjà hybridés puisque plus de la moitié des cellules de notre corps ne sont pas humaines et près de 99% des gènes de notre corps sont bactériens également…). Enfin dans SAPIENS on aborde la possibilité de la scission de l’humanité en trois espèces : les cyborgs, les hybrides et les sapiens qui refusent l’augmentation ou la transformation ou ne peuvent se la permettre par manque de moyens…

Concernant l’installation : quel est le principe et fonctionnement de ce dispositif qui peut, si j’ai bien compris, être proposé comme simple installation ou comme dispositif avec des danseurs ?
L’installation propose aux visiteurs une expérience complètement immersive et interactive, tant au niveau visuel que sonore. Elle est composée de trois panneaux en plexi équipés de smartfilm, ce qui permet de contrôler leur degré d’opacité ou de transparence. Chacun des panneaux est équipé d’une  »sensebox ». Conçue par le designer d’interaction visuelle Jérôme Delapierre, chaque sensebox contient plusieurs types de caméras (infrarouges, kinects…), un ordinateur et un projecteur.
Sur les deux côtés des panneaux sont projetées des images déconstruites et retravaillées de la série web dans lesquelles les visiteurs ou les performeurs peuvent s’inscrire grâce aux caméras. Dans certains cas il n’y a pas de contenu de la websérie, mais les images des visiteurs ou performeurs sont transformées en temps réel pour leur donner une temporalité différente ou pour les faire apparaître par exemple en pointcloud ou sous des formes plus abstraites. Les données recueillies par les caméras sont aussi utilisées pour transformer le son en temps réel. La composition de Thom Gossage est déconstruite à travers l’espace et reconstruite en temps réel par les visiteurs ou les performeurs qui déclenchent ou transforment des sons grâce à un dispositif créé par le designer d’interaction sonore Frédéric Filteau.
Trois sculptures de l’œuvre Family portrait de Marilene Oliver ont été intégrées à l’installation. Il s’agit des corps scannés de l’artiste, de sa mère et de sa sœur reconstruits par couches d’imagerie médicale gravées en cuivre sur plexi. Une table lumineuse provenant de notre exposition Le corps en question(s) complète l’Installation. Si on assiste à une performance (d’une durée de 30 min), on découvre grâce aux actions des interprètes, tout le potentiel d’interaction de l’Installation. Mais on peut aussi la visiter en dehors des performances et la découvrir de façon intuitive. Pendant les performances, l’installation est programmée dans le temps avec des contenus visuels et sonores et des concepts interactifs qui évoluent pendant les trente minutes.

Au sens strict, la scène est une « incarnation » de ce projet avec la présence physique de danseurs : quelles sont les différences par rapport à la web-série ?
Les danseurs sont présents physiquement aussi dans l’installation. Chaque partie du triptyque permet d’aborder des facettes différentes de la thématique, c’est ce qui fait son intérêt pour les créateurs. Chaque forme engage aussi le spectateur différemment : de façon plus individuelle avec la websérie que l’on regarde sur son téléphone, tablette ou ordi. C’est une expérience très immersive dans l’installation qui met en jeu le corps du spectateur… Dans l’expérience scénique, le public est captif, l’histoire se déroule dans le temps et dans l’espace devant eux… D’une forme à l’autre, on ajoute des couches de matériel chorégraphique et de sens… J’ai déjà parlé plus haut des thèmes abordés dans la websérie, ils restent présents dans l’installation, mais les frontières entre la virtualité et la réalité y sont beaucoup plus poreuses. On est dans les changements de perception du corps. On y aborde l’idée de transcendance des genres, âges et origines, la création d’identités plus fluides… Dans l’œuvre scénique on aborde l’IA, la notion d’algorithmes qui nous régissent, l’hyperconnectivité, la cohabitation des intelligences humaines et artificielles, la survie numérique, la transformation de nos architectures neuronales, l’avènement d’Homo Deus et la possibilité d’un monde sans nous…

Sur scène, comment avez vous « négocié » la ligne de partage entre le vivant et le virtuel ?
Il y a ambiguïté, fluidité avec des moments de contrepoint où on fait ressortir la physicalité, la présence vivante du corps, même au sein d’immenses images… Curieusement, l’œuvre scénique est aussi très immersive bien qu’on ait choisi un dispositif à l’italienne et je crois que cela provient du changement d’échelle donc, par moments, les corps se fondent aux images vidéo et deviennent très virtuels, mais on a aussi beaucoup de contrepoints, de contrastes où on revient à l’échelle humaine. Ces allers-retours entre l’humain et la virtualité et l’IA sont d’ailleurs au cœur de ce que je cherche à livrer dans l’œuvre scénique…

Concernant le dialogue, l’interaction, avec les spectateurs : concrètement, quelles sont les réactions, comportements et imprévus que vous avez pu constater ?
La websérie semble avoir vraiment conquis le public. Esthétiquement elle suscite de l’admiration, du point de vue du contenu elle intrigue et amène de nombreux questionnements. Dans l’installation un des enjeux est le partage de l’espace entre les interprètes et les visiteurs, du point de vue technologique, cela nous a amené de gros défis de programmation… Quand tout le monde est dans l’espace, qui va déclencher l’interaction ? Cette question de proximité avec les interprètes et de partage de territoire s’est révélée très intéressante, du point de vue des comportements des visiteurs qui varient énormément, dépendamment des mots utilisés avant qu’ils ne pénètrent dans l’espace de l’installation, et aussi du point de vue du design, de l’affordance. Au-delà de ça, l’installation est un espace enchanté par une technologie presque invisible, les gens sont émerveillés… À l’heure où je réponds à vos questions, la première de l’œuvre scénique n’a pas encore eu lieu…

Est-ce que vous tenez compte justement de ces réactions ? Est-ce que ce « feedback » alimente — ou pourrait alimenter — la forme et la narration du projet ?
Inévitablement, consciemment ou inconsciemment, tout le feedback nous influence, mais pour des questions de logistique et de temps il aura probablement plus d’impact au moment où on remonte les œuvres ou sur les créations à venir…

Justement, et sans forcément dévoiler vos prochains projets, est-ce que vous réfléchissez déjà sur d’autres technologies à mettre en œuvre (au propre comme au figuré) ?
Nous explorons la possibilité de créer un jeu de réalité virtuelle Eve 2050. Mais dans le cadre de ma prochaine création, je réfléchis aussi à une approche plus  »curated », plus minimale et très spécifique de l’utilisation des technologies…

La danse et le spectacle « vivant » en général sont entrés dans l’ère numérique, mais à côté vous ne perdez pas pour autant de vue les sciences dites « humaines » et « sociales » : quelques mots sur ce complément nécessaire, sur cette synergie ? 
Pour moi la technologie est avant tout un outil qui me permet de créer avec des moyens ancrés dans mon temps, mais ce qui nourrit profondément ma création c’est la transdisciplinarité, les échanges avec les scientifiques, qui ont été particulièrement présents depuis une douzaine d’années tant au niveau de la génétique, la recherche en cellules souches, la biologie et les neurosciences, que la physique quantique et tout ce qui a trait à l’exploration de la nature de la réalité…
Mais mes échanges avec des historiens, anthropologues, critiques d’art et artistes me permettent effectivement de continuer à questionner le rôle de la technologie dans la société, dans l’évolution de notre espèce et de garder un esprit critique. Mais en fait je n’ai jamais été particulièrement attirée ou adepte de la technologie, ce qui peut sembler étonnant quand on voit mon travail de ces dernières années. On m’a proposé un premier projet en 2006 que j’ai finalement accepté en 2008… À travers ce projet et les suivants, j’ai constaté que l’intégration de la technologie était intéressante pour mon travail et qu’il y avait aussi une certaine inévitabilité… mais j’ai développé une philosophie de la technologie au service de l’art, et non le contraire. Je conserve un regard plus critique que jamais sur la technologie…

propos recueillis par Laurent Diouf

Cie Van Grimde Corps Secrets, Eve 2050. > https://vangrimdecorpssecrets.com

Première à l’Agora de la Danse, du 8 au 11 octobre, espace Wilder, Montréal (Québec / Canada) > https://agoradanse.com